31 décembre 2006

JONATHAN RICHMAN : Jonathan goes country


Acquis probablement à La Clé de Sol à Reims en 1990
Réf : SPDCD 1037 (NETCD 16) -- Edité par Special Delivery en Angleterre en 1990
Support : CD 12 cm
12 titres

En 1989, Jonathan Richman a abandonné, définitivement il semble, le nom de groupe "Modern Lovers" pour l'accompagner, et a sorti un album sans titre très dépouillé sous son seul nom.
En 1990, par surprise, il a sorti un disque où il est accompagné par un groupe au complet, un disque "country" qui plus est. Quand on voit le titre, "Jonathan vire country", et surtout la pochette, qui montre Jonathan se faisant refiler une paire de bottes de cowboy rouges chez Western Wear, on peut penser qu'on a à faire à un disque parodique ou au second degré. Mais non, surtout pas. Je pense que le titre du disque et sa pochette servent à indiquer que Jonathan a décidé de sortir un disque de country ("J'avais une série de chansons qui pouvaient bien sonner en country", a-t-il déclaré alors sur une radio anglaise) sans se prendre au sérieux, mais par contre il a pris très au sérieux la musique qu'il a enregistrée pour ce disque.
Les producteurs du disque et principaux accompagnateurs sont membres de deux groupes réputés, les Morells et les Skeletons, mais ce n'est indiqué nulle part, et je ne le savais pas à l'époque. Le disque est enregistré non pas à Nashville, mais chez les Morells, dans le Missouri. Philippe R. me l'a rappelé récemment, et c'est spécifié dans les notes de pochette, mais come je n'avais jamais entendu parler de Buck Owens en 1990, je n'y avais pas prêté attention : il y a une vraie vedette invitée sur ce disque, le joueur de pedal steel guitar Tom Brumley, qui a fait les beaux jours des Buckaroos de Buck Owens. Aujourd'hui, maintenant que je connais un peu les productions de Buck Owens des années 60, je dirais que c'est de ce style de country que ce disque se rapproche le plus.
Le son et la qualité de jeu sur ce disque sont excellents, et les vocaux de Jonathan Richman le sont tout autant : on sent que par rapport à certains autres de ses disques, enregistrés dans une ambiance plus "live", il s'est particulièrement appliqué au chant (Je veux dire par là qu'on a l'impression, par exemple, qu'il n'a pas enregistré ses parties de voix en même temps qu'il jouait - excellemment - de la guitare).

Les douze titres de l'album se répartissent en trois groupes : trois nouveaux originaux, quatre nouvelles versions de chansons déjà précédemment enregistrées dans les années 80 (c'était la première fois, mais c'est depuis devenu systématique : à chaque nouvelle chanson Jonathan revisite au moins une de ses propres chansons).

Des nouvelles chansons, ma préférée est celle qui ouvre l'album, "Since she started to ride". Pour le coup, elle est complètement country, dans le son et le thème, mais d'un autre côté, je ne suis pas sûr qu'il y ait tant de chansons que ça qui parlent d'une épouse de plus en plus indépendante depuis qu'elle s'occupe de chevaux ("Je ne la vois plus beaucoup depuis qu'elle a commencé le cheval, elle est fatiguée le soir et partie le matin", "Les chevaux, les humains, si elle devait donner sa préférence, vous pouvez parier qu'elle irait à ceux qui galopent et on besoin d'anti-mouches"). On pourrait craindre l'exercice de style, mais on sent qu'il y a du vécu là-dedans et on n'a pas l'impression d'entendre un pied-tendre s'essayer à la country. C'est la même chose avec "Reno" (Chérie, on trouve une babysitter d'urgence et on va s'éclater tout le week-end à Reno) et "You're crazy for taking the bus" ("T'es cinglé de prendre le bus, Oui et alors, Deux jours entiers dans ce bus puant, Oui et je dors bien, alors vous prenez l'avion et moi je prends le bus cette fois-ci").

Les anciennes chansons sont très réussies dans leurs nouveaux arrangements country. Ça marche notamment très bien pour les chansons d'amour "You're the one for me" et la presque-à-l'eau-de-rose "I must be king" ("Puisqu'on est comme des petits oiseaux, ça doit être le printemps, Puisqu'elle est ma reine, je dois être roi"). Pour la nostalgique "Corner store", ça marche très bien aussi.
J'aime aussi beaucoup la version de "The neighbors", qui n'est pas ratée comme "Los vecinos" sur l'album en espagnol", mais je garde une petite préférence pour la version originale sur l'album "Jonathan sings !". Elle est l'une des plus réussies des chansons "adultes" de Jonathan. Grosso modo, ça commence presque comme du théâtre de boulevard : Jonathan passe la nuit chez une amie dont le mari est absent, et l'amie lui conseille de partir pour éviter que les voisins jasent. Jonathan répond que sa propre femme le connaît bien et qu'il refuse de laisser les voisins gérer sa vie. Et après il raconte l'épisode à sa femme en lui expliquant qu'il a passé la nuit à discuter avec son amie parce qu'ils avaient beaucoup de choses à se dire. Evidemment, très vite l'auditeur se demande s'il s'est passé quelque chose entre Jonathan et son amie cette nuit-là, et du coup il se retrouve exactement dans la position des-dits voisins qui se posent des questions. Mais, loin de s'en tenir à la comédie de situation, les vrais thèmes de cette chanson de moins de trois minutes sont la confiance entre partenaires dans une relation amoureuse et le refus de la pression sociale !!

Des cinq reprises, seule "Rodeo wind" est une chanson sympathique, mais un peu quelconque. "Your good girl's gonna go bad" et "I can't stay mad at you" sont données dans d'excellentes versions instrumentales qui sonnent autant rock'n'roll sixties que tout ce que Jonathan a pu enregistrer par ailleurs. Quant à "Man walks among us" et "Satisfied mind", ce sont deux joyaux qui traitent de thèmes que Jonathan aurait pu aborder dans certaines de ses chansons ("Ancient long ago", "Up in the sky sometime" par exemple). "Man walks among us", avec ses très beaux choeurs, est une chanson de Marty Robbins de 1963 écrite du point de vue des animaux qui voient les hommes s'avancer et gagner du terrain sur leur désert. Quant à "Satisfied mind", qui clôt magistralement l'album, c'est une chanson philosophe presque zen, un classique. J'en connais des versions par les Byrds et les Walkabouts, et même par Johnny Cash, et il y en a des dizaines d'autres, mais seule celle-ci me semble essentielle.
Un seul regret à l'écoute de ce disque : que Jonathan Richman n'ait pas eu les moyens, l'envie ou l'occasion de tourner en Europe avec le groupe qui a enregistré ce disque...

5 commentaires:

Marionnette a dit…

Bonjour à tous
Qui pourrait me dire si un concert de Jonathan Richman est prévu en France en 2008
and Happy New Year

Pol Dodu a dit…

Marionnette,
Rien d'annoncé officiellement encore, mais comme un nouvel album doit sortir prochainement, on peut peut-être espérer une tournée européenne au printemps 2008...

Anonyme a dit…

jonathan richman en concert le 2 mai 2008 au théatre garonne à toulouse!

Pol Dodu a dit…

Effectivement, et aussi le 3 mai à Marseille (Le Poste à Galène) et le 7 à Paris (Nouveau Casino) !

Pol Dodu a dit…

La coïncidence est trop belle pour ne pas être soulignée : au cours de la même journée, deux des blogs que je suis régulièrement, Ordet Blog et The (new) Vinyl Villain, ont chacun publié une chronique de Jonathan goes country ! :
When the roadrunner went country on us par JC
Jonathan Richman - Jonathan Goes Country (1990) par Philippe L.