31 décembre 2014

THE WAKE : Something outside


Acquis neuf peut-être à Londres fin 1983
Réf : FBN24 -- Edité par Factory Bénélux en Belgique en 1983
Support : 45 tours 30 cm
Titres : Something outside -/- Host

Je me demande bien où et quand j'ai acheté ce disque. J'aurais parié que c'était chez A la Clé de Sol à Châlons, au moment de sa sortie mais, selon la discographie du groupe, ce maxi serait sorti à l'automne 1983, à un moment où j'étais à Londres. D'où le souvenir reconstruit que j'aurais acheté ce disque à Londres. Mais alors je l'aurais entendu où ? En écoutant l'émission de John Peel, le Bernard Lenoir anglais ? Pourquoi pas, ça ferait toujours une bonne histoire à raconter.
En tout cas, j'ai ressorti ce disque, que je n'avais pas dû écouter depuis une bonne dizaine d'années après avoir lu plusieurs mentions enthousiastes à propos de la sortie d'une nouvelle compilation de The Wake, Testament : Best of. Un enthousiasme qui m'a surpris car The Wake est toujours resté pour moi un groupe mineur, l'un de ceux de la galaxie Factory qui, comme Section 25 par exemple, sont toujours restés dans l'ombre de Joy Division / New Order, sachant que je n'ai pas du tout suivi la deuxième partie de leur carrière chez Sarah et que l'anecdote de la présence dans le groupe du jeune Bobby Gillespie à la basse vers 1982 n'a pas plus développé que ça mon intérêt pour le groupe.
Alors j'ai remis Something outside sur la platine et de nouveau la magie a opéré. Je sais pourquoi j'ai eu envie d'acheter ce disque il y a une bonne trentaine d'années et, même si mes goûts ont beaucoup évolué entre-temps, j'aime toujours autant cette chanson. Pas besoin d'attendre que les huit minutes soient écoulées. Juste l'intro, avec batterie et synthés, la partie musicale ensuite et la première partie chantée ("I sleep alone and in my dreams I just see what I want to see. I should have known I could be wrong depending on your promises. But all the people say to me there's something else for you to be. And all the people say to me there's nothing else for you to be.") et je suis transporté.
Et pourtant, il n'y a pas à dire, on est dans le décalque de New Order le plus complet. Musicalement, c'est du New Order 1981-1982, avec les sons de synthé à la Gillian Gilbert, l'ambiance générale, le chant à la Bernard Albrecht. Et puis il y a le reste, le nom du groupe, parfaitement lugubre (La veillée, mortuaire, bien sûr), le même label, et la pochette, qui n'est pas de Peter Saville, mais c'est presque tout comme avec cette adaptation d'une affiche d'El Lisstzky...
Certes, le mimétisme n'est pas tout à fait à fait parfait, avec la basse notamment, plus douce et avec des touches reggae, mais tout ça devrait m'horripiler au plus haut point ou me rendre indifférent, mais non, pour une chanson au moins, Something outside, The Wake transcende son manque d'originalité et me plaît beaucoup à moi aussi.
En face B, Host, que je n'ai pas beaucoup écoutée à l'époque, est aussi complètement dans l'univers New Order, surtout pour le chant, avec une ambiance de dub léger assez marquée.
Il y a quelques années, j'ai acheté Here comes everybody, le deuxième album du groupe, sorti fin 1985. Pareil, j'y ai trouvé deux ou trois chansons que j'aime bien, mais sur la longueur il est difficile de supporter le côté dérivatif de leur musique.
Ça ne les a pas empêchés d'avoir un beau parcours avec quatre albums jusqu'en 1995, ni de se reformer en 2009, avec un nouvel album, A light far out, sorti en 2012.


The Wake, Something outside, en concert à The Hacienda, Manchester, en 1984.

26 décembre 2014

DANYEL GERARD : D'accord d'accord


Acquis chez Emmaüs à Tours-sur-Marne le 20 décembre 2014
Réf : EP 953 -- Edité par Disc'AZ en France en 1964
Support : 45 tours 17 cm
Titres : D'accord d'accord -- Cher Daniel -/-Il pleut dans ma maison -- Il n'y a pas si longtemps

Trouver un 45 tours original des Standells chez Emmaüs, je n'y rêve même pas. Le jour où ça arrive, même si le truc est passé dans une machine à laver, vous serez les premiers au courant.
Trouver chez Emmaüs un disque avec une reprise en français d'époque des Standells, je n'y pensais même pas car je ne pensais pas que ça existait. C'est pourtant ce qui m'est arrivé samedi dernier, le jour où j'ai aussi trouvé mon disque de Folklore de Colombie, avec cet EP en bon état de Danyel Gérard, que j'ai pris à 50 centimes, parce qu'il était en bon état justement, parce que les paroles du premier titre sont signées Pierre Barouh, et surtout parce qu'il est arrangé par Michel Colombier.
Ce premier titre, D'accord d'accord, signé aussi par Danyel Gérard et L. Tamblyn, est indiqué comme étant, côté danse, un Shake - Hully-Gully, mais ce qui n'est pas précisé c'est que la chanson est une adaptation en français de The shake, justement, l'un des tous premiers enregistrements de The Standells, deux ans avant Dirty water. En France, un EP In person at P.J.'s a été édité, avec The shake en titre, principal, sûrement  dans sa version studio, et ça doit être là que Danyel Gérard a pêché son idée de reprise.
La chanson originale n'a pas vraiment un son garage, mais est toute sautillante avec son orgue. Côté paroles, c'est basique de chez basique, et il n'est question que de se secouer un peu partout, dans les endroits à la mode où on danse, avec je suppose tous les sous-entendus possibles.
D'accord d'accord en est une reprise très réussie. Musicalement, c'est assez fidèle, avec l'orgue et la guitare bien présents. Les choeurs sont habilement adaptés avec "Come on" qui devient "D'accord" et les "Hou wou hou wou hou  wou hou" qui deviennent "Mais où est-elle passée ?". Outre l'interprétation, les paroles sont d'ailleurs l'autre réussite de cette reprise. Là, ça raconte une petite histoire, celle de Danyel à la recherche de sa copine dans tout Paris. Et comme il est question sur un ton léger de chercher une fille dans un bar, ça peut faire penser au Twenty-two bar de Dominique A, même si musicalement ça n'a rien à voir.
Alors que le répertoire des sixties est largement exploité par tout le monde depuis des années, on peut s'étonner que personne n'ait, à ma connaissance, songé à faire une reprise de cette adaptation en français des Standells.
D'accord d'accord a été un succès, et ce disque en compte un autre, Il pleut dans ma maison, une chanson originale, un autre enregistrement de qualité (avec 3 pistes et 11 microphones !). Parait-il que ce serait un calyso. C'est sûrement vrai, mais pas évident d'emblée.
Cher Danyel est aussi très agréable, qui joue sur la popularité de la vedette en se moquant gentiment de ses lettres de fans ("Cher Danyel, il faut que tu m'épouses" - "Laissez-moi réfléchir un peu"). Ce n'était pas si courant à l'époque. Seul le slow de rigueur, Il n'y a pas si longtemps, est largement dispensable et le pire c'est qu'il ne doit y avoir aucune once d'ironie dans les paroles de Jacques Plante telles que "Il n'y a pas si longtemps tu m'aimais d'amour et je croyais qu'un printemps ça durait toujours. C'est si facile à Paris de croire au bonheur,surtout quand les marronniers sont en fleurs".
On a rarement de très bonnes surprises avec les disques yé-yé, mais celui-ci en était une. Maintenant, je retourne à la pêche aux Standells !




24 décembre 2014

BOYFRIEND : Hey big star


Offert par Creation Records par correspondance en 1993
Réf : caug 002 t -- Edité par August en Angleterre en 1993
Support : 45 tours 30 cm
Titres : Hey big star -- Jahlopee -/- Guitarist nipple -- Flew out

Ce disque fait partie de ceux que j'ai continué de recevoir en cadeau de Creation jusque vers le milieu des années 1990 car je conservais des amis dans la place. On est aussi dans la période où Creation sortait énormément de disques et où la mégalomanie ambiante, même avant l'arrivée d'Oasis, a conduit à la création de plusieurs labels associés. Mais, comme pour Elevation, la tentative d'Alan McGee de s'associer avec Warner en 1987, la plupart des labels créés par Creation ont eu une durée de vie limitée et, pue de succès, sauf pour la maison de rééditions Rev-Ola, qui a survécu à Creation, et peu d'impact artistique, à l'exception du label technoïde Infonet, dont je finirai bien par chroniquer un disque ici. Sinon, le label dance Eruption, l'éphémère Ball Product d'Ed Ball.
Le label noisy pop August ("Part of the Creation Pantheon of pop"), qui a duré grosso modo deux ans, de 1993 à 1994, était le bébé de David E. Barker (ex-Glass, Fire, Paperhouse, Seminal Twang), qui était alors l'un des directeurs de Creation. Au catalogue d'August, on trouve deux signatures "internationales", Shonen Knife et Ween, 18 Wheeler, qui est passé ensuite sur Creation, Eugenius, Autohaze, et aussi un album, un mini-album et ce single de Boyfriend.
Boyfriend est un groupe de Glasgow. Ils ont répété un moment dans le studio de Teenage Fan Club et je dirais qu'ils ne sont jamais sortis de l'ombre de ce groupe. Un de leurs rares titres de gloire est d'avoir été à l'affiche d'un concert de 18 Wheeler à Glasgow en 1993 le soir où Alan a découvert Oasis. Leur album Hairy banjo a été produit par Paul Chisholm, également producteur de Teenage Fan Club et des Pastels, Si Meat Whiplash était un simple écho du feedback de The Jesus and Mary Chain, on peut dire à la façon de Miossec que Boyfriend évoluait en troisième division de la noisy pop écossaise. A l'exception du court instrumental sympathique Rockwieller, je trouve leur album poussif et sans originalité, y compris les deux extraits qu'on en trouve sur ce maxi, Hey big star et Guitarist nipple. Il y a même au moins une véritable horreur sur cet album, #two. L'un des inédits de ce maxi, Flew out, est très mauvais aussi, mais pas à ce point-là quand même.
Pourquoi alors s'ingénier à parler de ce disque s'il est sans intérêt ? Eh bien parce qu'il y a une chanson qui le sauve, qui m'a accroché dès la sortie du disque et que du coup j'ai passé plusieurs fois à l'époque dans mon émission Vivonzeureux! sur Radio Primitive. Cette chanson, qu'on ne trouve que sur ce disque, c'est Jahloppee. Certes, elle n'a rien de particulièrement original, mais je la trouve agréable et accrocheuse, surtout grâce à son riff d'intro. Il est suivi d'un bon couplet, d'un pont un peu branlant mais qui tient le choc, d'un passage instrumental qui reprend le riff, et il y a des choeurs sur le dernier refrain, un peu à la Pastels ("I know when something is wrong, I know when something is right"). C'est tout, mais ça suffit pour me faire me souvenir de Boyfriend vingt ans après leur minute de gloire.

Boyfriend, Jahloppee.

22 décembre 2014

FOLKLORE DE COLOMBIE


Acquis chez Emmaüs à Tours-sur-Marne le 20 décembre 2014
Réf : PS 185 -- Edité par [sans] probablement en France probablement dans les années 1950
Support : 33 tours 17 cm
10 titres

La solution pour faire des trouvailles chez Emmaüs, c'est peut-être d'espacer mes visites, histoire de laisser du temps au stock pour qu'il se renouvelle. Après plusieurs mois, j'ai été bien content de trouver plusieurs disques samedi à Tours, dont ce Folklore de la Colombie, très intéressant musicalement et mystérieux à plus d'un titre.

Ce petit disque qui s'écoute en 33 tours, avec sa belle photo de pochette, est visiblement édité en France. On trouve au dos des informations détaillés sur chacun des dix morceaux, avec le genre musical, le titre, les instruments utilisés et quelques mots d'information. Par contre, aucune information sur les conditions d'enregistrement ou sur l'auteur des notes de pochette. Et surtout, aucune indication de maison de disques ou d'éditeur, ni sur la pochette, ni sur les étiquettes, très sobres, qui ne comportent pas non plus de timbre BIEM, juste un n° de série, PS 185, la liste des titres et leur répartition : Folklore colombien des terres chaudes pour la face 1, Folklore des andes colombiennes pour la face 2.
La plupart des titres sont courts, voire très courts, mais l'ensemble est de grande qualité.

On ouvre avec El tamborcito, un Merengue joué avec des guitares et des tiples. Le titre suivant, La playa, très rythmé, est lui aussi excellent. C'est un Porro, un sous-genre de Cumbia. Mon moment préféré du disque, c'est sûrement la première partie de Ve lo que bonito, présenté comme un chant noir du Choco. Malheureusement, après quarante secondes, ce chant est repris par un chœur de la Cordillère et là c'est baucoup moins intéressant.
Les flûtes font leur apparition avec le quatrième titre, El rio blanqueño, sur un rythme de Bambuco (il y en a un autre exemple sur la face 2). Elles sont très présentes sur le reste du disque, notamment sur le très court morceau de Cumbia qui clôt la première face.

La face 2 s'ouvre avec trois chants, dans un style de musique des Andes qu'on connait mieux par ici, avec Guavina, Torbellino , le "tourbillon des rubans", très proche de La bamba, et Del canionero santanderiano ou Le crépuscule, chant du département de Santander, avec ses cordes basses et ses flûtes. Contrairement à ce qui est indiqué sur la pochette, la musique indienne Chibcha, avec flûtes et tambours, est le dernier titre de cette face 2, pas le premier.

J'ai trouvé très peu de mentions de ce disque en ligne, par contre j'ai découvert qu'il a été réédité tel quel en CD en 2010 par RDM Edition sous le titre Colombia : folkore de Colombie et musique des Andes (on peut y écouter 30 secondes des 5 premiers titres). Très bien, mais 8 € pour 14 minutes de CD, il faut oser ! Apparemment, RDM est spécialisé dans la réédition d'enregistrements du domaine public. Il y a de tout à leur catalogue, et même un Jouvin !

21 décembre 2014

THE GORILLAS : Gatecrasher



Offert par Phil King par correspondance en novembre 2014
Réf : NS 8 -- Edité par Chiswick en Angleterre en 1977
Support : 45 tours 17 cm
Titres : Gatecrasher -/- Gorilla got me

Comme prévu, j'ai assisté cet été à la projection à Paris du documentaire de Caroline Catz A message to the world : Whatever happened to Jesse Hector ?, qui retrace le parcours du musicien connu notamment pour son groupe The Hammersmith Gorillas. Une très bonne soirée ! Le documentaire est désormais disponible en DVD chez RPM Shout ! avec Running wild, un CD d'anthologie des enregistrements de Jesse Hector des années 1990.
Ce jour de juillet, j'en ai appris une bonne de la bouche de Philippe M., à propos de la pochette du 45 tours Gatecrasher des Gorillas, dont les deux faces figuraient sur ma compilation Chiswick : le dessin de la pochette aurait été fait à l'origine pour un concert du groupe à Epernay, selon une info donnée par
Jean-Claude Savy sur le groupe Facebook Jesse Hector !
Une fois rentré, j'ai effectivement retrouvé les messages de Jean-Claude du
28 mai et du 3 juin 2014, avec notamment ceci :
  • "GORILLAS : Petite histoire française …
    Lorsqu’en 1976 l’association d’Epernay ROCK ENERGIE (nom suggéré par Marc Zermati et retenu par l’asso) décida d’organiser un concert des GORILLAS, Gérard ROSE, ami d’enfance de Michel AGNES (l’un des fondateurs de cette asso), proposa de réaliser le visuel de l’affiche.
    Un visuel fut finalisé et une autre illustration réalisée.
    Malheureusement l’affiche (40x60cm) ne fut jamais imprimée et seuls quelques rares tirages de travail d’après le calque original furent faits.
    Seul le bandeau (jaune ou vert) sera utilisé pour la promo de ce concert.
    Jesse HECTOR aima les deux dessins. Dédicaça 1ou 2 tirages de l’affiche «Gorillas Scottish Rock» et emporta le calque original de l’autre dessin.
    Celui-ci sera utilisé par CHISWICK pour illustrer le futur single du groupe: «Gatecrasher».
    "
Sur les bandeaux, j'ai appris que le concert des Gorillas avait eu lieu le vendredi 19 novembre 1976, non pas à Epernay mais à la M.J.C. d'Ay, soit à deux kilomètres à tout casser de mon domicile actuel ! De ce que j'en comprends, la tournée a dû être organisée par Skydog cet automne-là après le passage remarqué des Gorillas au premier Festival punk de Mont de Marsan. Skydog a même édité en France, sûrement à cette occasion, le 45 tours Gatecrasher, sans pochette.


Un tirage du dessin de Gérard Rose pour le projet d'affiche des Gorillas à Ay le 19 novembre 1976, dessin qui s'est retrouvé au verso de la pochette du 45 tours Gatecrasher.

J'ai beaucoup aimé cette histoire du dessin fait dans l'optique d'un concert associatif au fin fond de la France qui se retrouve quelques semaines plus tard au verso de la pochette d'un 45 tours anglais (également édité en France avec cette pochette, distribué par Barclay), surtout avec l'aspect local rajouté par dessus. J'ai demandé à l'ami Phil King, qui a participé au documentaire, de se mettre aux aguets pour me procurer un exemplaire du single s'il en voyait passer un. Il a fait mieux que ça, puisqu'il m'a offert le 45 tours une fois trouvé. Merci Phil !
Mon projet était aussi de recueillir le témoignage de Gérard Rose sur les aventures peu banales de son dessin. Je voulais savoir comment il s'était retrouver à dessiner ces projets d'affiche de concert à Ay, même si Jean-Claude Savy en parle déjà, ou s'il en avait dessiné d'autres pour Epernay Energie ou d'autres associations. Surtout, j'aurais aimé connaître ses souvenirs du concert des Gorillas à Ay, et notamment la réaction des membres du groupe quand ils ont découvert ses dessins. Je me demande aussi à quel moment il a su que son dessin était devenu une pochette de disques et s'il avait été à un moment ou un autre en contact avec le groupe ou le label après le concert. Il n'est pas vraiment crédité sur la pochette, mais c'est sûrement parce que le groupe ne connaissait pas son nom, par contre sa signature "G. Rose" qui était sur le dessin original est bien visible en bas à droite, mais elle est à l'envers car le dessin a été inversé pour la pochette.
J'aurais bien aimé aussi savoir s'il a d'autres souvenirs marquants de concerts à Ay et s'il dessine encore aujourd'hui. Malheureusement, je n'ai pas encore reçu sa réponse.


L'autre projet d'affiche de Gérard Rose pour le concert des Gorillas à Ay. Le "Scottish rock" fautif trouve peut-être son origine dans un article d'Alain Pacadis dans Libération le 6 août 1976.

Pour ce qui est du disque lui-même, au fil des écoutes je me suis mis à apprécier de plus en plus Gatecrasher. Simplement, comme pour beaucoup de productions Chiswick, il n'y a rien de punk là-dedans. Du pur rock and roll, avec un vernis glam qui n'est pas complètement écaillé. Je garde cependant toujours une préférence pour le quasi-instrumental Gorilla got me, avec ce titre-jeu de mots qui fait référence à You really got me, repris avec succès par The Hammersmith Gorillas en 1974.
Et si quelqu'un était à ce concert des Gorillas à Ay, ou même dispose d'une liste des concerts organisés à la M.J.C. à cette époque, les commentaires sont ouverts !



Les bandeaux imprimés, au bout du compte les seules affiches utilisées pour la promotion du concert des Gorillas à Ay le 19 novembre 1976.

14 décembre 2014

LEONARD COHEN : Dance me to the end of love


Acquis d'occasion dans les années 2000
Réf : A 4895 -- Edité par CBS en Europe en 1984
Support : 45 tours 17 cm
Titres : Dance me to the end of love -/- Coming back to you

Cinq ans après Recent songs, c'est avec Dance me to the end of love, aussi bien sur ce 45 tours qu'en ouverture de l'album Various positions, que le public a découvert le nouveau Leonard Cohen, c'est à dire le même qu'avant mais avec la voix toujours plus grave et des sons toujours plus synthétiques. Sur disque, Cohen n'a plus beaucoup changé de style depuis.
Après la collaboration éprouvante avec Phil Spector pour Death of a ladies' man et le succès moyen de Recent songs, cette évolution n'a pas plu à Walter Yetnikoff, le grand patron de CBS aux Etats-Unis, qui a carrément refusé de sortir l'album en Amérique du Nord. Jusqu'à sa réédition en CD, c'était le seul des disques de Leonard Cohen qui n'était pas sur CBS sur ce continent, mais chez Passport, un bien plus petit label.
Ce disque est aussi le deuxième album de Cohen produit par John Lissauer, après New skin for the old ceremony en 1974, et aussi après une collaboration avortée en 1975 pour le projet Songs for Rebecca. Autant en 1974, la production de Lissauer était très proche de son travail en collaboration avec Lewis Furey, pour son premier album notamment, autant là il abandonne ses sons préférés (instruments à vent, banjo) pour n'ajouter que du piano et des claviers aux voix et au groupe de base (Basse, batterie, guitare, violon).
Aux premières notes de Dance me to the end of love, c'est saisissant, on a l'impression que c'est un orgue avec accompagnement automatique de boite à rythmes et d'accords de basse qui joue. Les "La la la" qui viennent ensuite font office de refrain et donnent à la chanson une forte coloration klezmer. Dans un entretien à la télé australienne (voir ci-dessous), Cohen explique qu'à l'origine il voulait faire une chanson sur Berlin, mais au fil de l'écriture les couplets sur Berlin ont été écartés et c'est devenu une chanson d'amour, avec un contexte particulier car il avait en tête l'image des groupes obligés de jouer dans les camps de concentration alors que les déportés étaient mis à mort.
C'est sûrement du synthé, mais dans les deux passages instrumentaux entre des couplets, j'entends quand même un écho des arrangements typiques de Lissauer, avec un son de banjo associé au violon.
Une vidéo a été réalisée pour cette chanson en 1985, tournée en France par une amie proche de Cohen, Dominique Issermann, une photographe surtout connue ici pour sa pochette et son adaptation française des paroles de l'album de Carole Laure, Alibis. La vidéo a été tournée, pas dans un hôpital psychiatrique mais dans "un hôpital normal, où les gens sont malades et meurent", comme Cohen le précise dans l'entretien australien, avec en vedette l'actrice Susan Hauser., qu'on retrouvera dans une autre vidéo réalisée par Dominique Issermann en 1988, pour First we take Manhattan. En 2012, elle a aussi réalisée Moments of old ideas, avec des extraits de huit titres de l'album Old ideas.
En face B, on trouve le deuxième titre de l'album, Coming back to you, une belle chanson d'amour en forme de ballade, assez typique de Leonard Cohen.
Aucun des deux 45 tours extraits de Various positions ne s'est très bien vendu. L'album non plus, probablement. Et pourtant, Dance me to the end of love est devenue une chanson importante du répertoire de Cohen, figurant sur
plusieurs compilations et sur des disques en concert. Mais l'autre single extrait du disque, Hallelujah, est lui devenu carrément mythique, par le biais des reprises par John Cale, Jeff Buckley et des dizaines d'autres, à tel point qu'en 2010 Alan Light lui a consacré tout un livre, The holy or the broken.


La vidéo pour Dance me to the end of love réalisée par Dominique Issermann en France en 1985.


Leonard Cohen, Dance me to the end of love, en direct dans le Mike Walsh Show du 20 mai 1985, en Australie, suivi d'un entretien.


Leonard Cohen, Coming back to you, en direct dans une autre émission de télé australienne, en 1985.

13 décembre 2014

MEMPHIS SLIM : Blues for Nathalie


Acquis à la Bibliothèque Georges Pompidou à Châlons-en-Champagne le 6 décembre 2014
Réf : ESP 155 507 -- Edité par Espérance en France en 1975
Support : 33 tours 30 cm
14 titres

La bibliothèque de Châlons démarrait la semaine dernière une braderie de documents retirés de ses collections. Des livres et des CD à 1 €, et même des 33 tours à 2 €, parce qu'ils sont en multiples exemplaires dans les magasins et parce qu'il faut faire de la place.
L'ambiance était bon enfant, mais c'était vraiment la cohue peu de temps après l'ouverture samedi dernier, avec une grappe de bras tendus vers les quelques caisses de disques rock. Le temps que ça se calme un peu, j'ai fait le tour et j'ai pu accéder plus facilement à l'unique caisse étiquetée jazz, moins convoitée, d'où j'ai retiré deux disques, un album de 1972 d'Eddy Louiss, Orgue, et ce Blues for Nathalie de Memphis Slim.
A part la liste des titres et l'année de sortie, il n'y a aucune information au verso de ce disque, sorti uniquement en France sur le label Espérance, surtout connu pour son catalogue d'enregistrements africains. Je m'attendais donc à un disque en solo au piano, ou en duo avec son batteur habituel Michel Denis, mais je tenais à prendre ce disque car je suis particulièrement attaché à Memphis Slim, peut-être le seul des grands bluesmen américains que j'ai vu plusieurs fois en concert (un fait rendu possible car Memphis Slim a vécu en France de 1962 à sa mort en 1988. En plus, il avait des attaches particulières avec Reims, où il se produisait régulièrement, notamment au restaurant de la galerie Clair-Marais en centre-ville où je l'ai vu au moins une fois).
Je n'étais pas sûr que la musique sur ce disque allait particulièrement me plaire, mais de toute façon, avec une aussi belle photo de pochette, je ne l'aurais pas laissé passer. Je me demandais qui était la Nathalie mentionnée dans le titre de l'album. Comme aucun titre de chanson ne contient ce prénom, j'ai bien pensé qu'il s'agissait de la petite fille sur la pochette. C'est bien le cas, puisqu'il semble bien que sur cette photo Memphis Slim est avec sa fille Nathalie. Sur l'album Boogie woogie en 1971, il y avait déjà Nathalie's boogie et Jessica's boogie, dédiés à sa fille et à son épouse. On retrouve Nathalie en photo sur la pochette de l'album Memphis Slim with guests.
C'est rien de dire que j'ai été agréablement surpris dès l'écoute du premier titre du disque. Chunkin ne ressemble à rien de ce que je connaissais de Memphis Slim. C'est une chanson de rhythm and blues tranquille et dansante, avec de la guitare (Mickey Baker ?) et de l'orgue, plutôt que le piano habituel de Memphis Slim. Une des millions de chansons sur une danse particulière, le Chunkin', mais c'est plus qu'agréable. Au son, je me disais bien que ça devait dater d'avant 1975, et effectivement, Chunkin avait été édité précédemment en 45 tours en France sur le label Calumet, avec un tampon BIEM plutôt que SACEM, ce qui signifie qu'il date de 1970 au plus.
La bonne nouvelle, c'est qu'on a aussi ici la face B de ce 45 tours, Lonely night, une ballade, enregistrée aussi en groupe, avec des cuivres cette fois, et même un solo de guitare électrique.
Sans aucun crédit, c'est dur à dire, mais il y a peut-être sur le disque un autre titre datant de la même session que Lonely night, l'excellent You got a lot of soul, très rhythm and blues lui aussi, le seul autre titre avec des cuivres, et là c'est l'un d'eux qui prend le solo.
Le reste de l'album est plus traditionnellement blues mais tout aussi enthousiasmant. Il semble y avoir deux formations différentes. En face A, Memphis Slim au piano est accompagné juste par une guitare électrique, il me semble. Avec Gone for twelve hours (où il y a une deuxième guitare, quand même, on dirait bien), il réussit l'exploit de composer un blues presque gai. Certes, sa chérie est partie depuis douze heures, ce qui fait onze de trop, mais il l'attend avec une bonne nouvelle, puisqu'une fois qu'elle sera rentrée il ne la laissera plus le quitter. Plusieurs titres du disque donnent cette impression paradoxale d'un blues heureux. Sur cette face, j'aime aussi particulièrement l'instrumental The big dream.
Sur le dernier titre de la face A, Pretending I'm happy, et en face B, Memphis Slim est seul au piano. Il y a deux autres instrumentaux, Easy going et Sweet as she can be, que j'aime bien, et parmi les titres chantés mon préféré est The natural fact.
On n'a pas souvent l'occasion d'acheter des disques en bibliothèque, mais des trouvailles comme celle-ci, j'en veux bien d'autres !

Dix titres de cet album ont été réédités en CD, par exemple sur Lonely nights en 1999. On peut aussi les écouter sur Deezer, entre autres. Chunkin, Lonely night, The big dream et Gone for twelve hours font partie du lot, mais pas You got a lot of soul, malheureusement.
Je n'ai trouvé aucun de ces titres en vidéo en ligne, mais je vous conseille, à peu près de cette époque, le concert de Memphis Slim au Festival de Montreux en 1973. C'est excellent. L'enregistrement de ce concert a été édité en disque sous le titre Very much alive and in Montreux.

08 décembre 2014

THE SUPERNATURALS : The day before yesterday's man


Acquis par correspondance via Discogs en décembre 2014
Réf : FOOD 88 -- Edité par Food en Angleterre en 1997
Support : 45 tours 17 cm
Titres : The day before yesterday's man -/- Honk Williams

Depuis quelques temps, je suis de près The Vinyl Villain, le blog d'un JC écossais qui chronique lui aussi ses disques, en ayant fait le choix d'en proposer des extraits à télécharger. Il publie plusieurs séries de billets, dont une dédiée à tous les singles solo de Morrissey, une autre à tous ceux de James, et il y a aussi le single écossais du samedi. C'est avec la 106e chronique de cette série que j'ai découvert un groupe dont je n'avais entendu parler avant, The Supernaturals, un groupe pop-rock de Glasgow qui a sorti trois albums entre 1997 et 2002.
Ce n'est pas spécialement la présentation du groupe qui m'a attiré, ni les commentaires de JC, mais j'ai trouvé le titre d'une des faces B, Honk Williams, suffisamment intriguant pour avoir envie d'écouter le titre. Et après l'avoir écouté et apprécié, j'ai fait même mieux que ça puisque je me suis commandé l'édition en 45 tours de ce single, pressé dans un superbe vinyl jaune.
Comme le précisait JC, l'intro de Honk Williams peut faire peur. Lui évoque Mull of Kyntire de Wings mais on pourrait penser à n'importe quel tube country-pop commercial, à la Eagles ou Fleetwood Mac. Mais il s'avère que, s'il devait être question de Fleetwood Mac, ce serait plutôt dans la version reprise par Camper van Beethoven, ou alors c'est à la country vue par Ween qu'il faut se référer, car ce qui fait l'intérêt de cette chanson, c'est son ton léger et ses paroles : "I was driving along in my pickup when suddenly the whole sky lit up with a spacecraft, and an alien standing at the door. He was dressed just like Hank Williams, he had a Stetson hat and eyes like a cat, and I was on my knees praying to the lord. I said "Mr. Spaceman, please don't abduct me. Take me away in your craft and fuck me, I'm just a poor, unfortunate country boy". He said "Son, there's something amiss, I was only taking a piss out of the back of my spacecraft, before I headed home. But why don't you and I have a sing-song ?" He produced a Gibson guitar and I sang along to Your cheating heart, and my, that spaceman could sing.".
Là-dessus, l'extra-terrestre remonte dans son engin et repart aussi vite qu'il était venu, et la chanson se termine avec un refrain qui reste bien en tête, "I see a pale reflection of a spacecraft up in the sky".
La face A est une chanson pop, pas mauvaise mais assez quelconque quand même. Par contre, Ken's song, l'autre face B du CD single présenté chez The Vinyl Villain, est intéressante, dans un style différent de Honk Williams.

Les trois titres du CD single, dont Honk Williams, sont disponibles en téléchargement chez The Vinyl Villain.



07 décembre 2014

HANK WILLIAMS WITH HIS DRIFTING COWBOYS : Hank's laments


Acquis sur la braderie-brocante d'Ay le 26 octobre 2014
Réf : MGM-EP-675 -- Edité par MGM en Angleterre en 1958
Support : 45 tours 17 cm
Titres : I can't help it (If I'm still in love with you) -- Dear John -/- Let's turn back the years -- A teardrop on a rose

Voici un autre des quatre 45 tours achetés pour 5 € à Ay cet automne. J'ai vraiment été content de trouver cet EP compilation anglais de Hank Williams, personnalité essentielle de la country et des origines du rock. Mon disque gratte pas mal, mais ce son de crin-crin rajoute à son côté d'époque.
Ce disque fait partie d'une longue série de EP sortis en Angleterre entre 1956 et 1963, qui prouvent que, dans les années qui ont suivi sa mort le 1er janvier 1953, l'intérêt pour ses chansons était marqué, et l'exploitation de son catalogue, qui continue encore aujourd'hui, florissante.
Le disque s'ouvre avec I can't help it (If I'm still in love with you), l'un des classiques écrits par Hank Williams, sorti à l'origine en 1951 en face B de Howling at the moon et repris depuis des dizaines de fois. Une chanson parfaite pour illustrer le titre général du disque, Les lamentations de Hank, avec sa guitare steel plaintive et ses paroles ("Dans la rue aujourd'hui je t'ai croisée et mon coeur est tombé à tes pieds, je n'y peux rien si je continue à t'aimer.").
Le titre suivant, Dear John, un autre single de 1951, mais une face A. Il n'a pas été créé par Williams mais par Jim Boyd en 1949, avant d'être enregistré par Tex Ritter. "Dear John" désigne une lettre de rupture, un thème de chanson très courant. Celle-ci, sur un rythme un peu plus rapide, est très réussie.
Sans être mauvais, les deux titres de la face B, Let's turn back the years et
A teardrop on a rose, sont vraiment des tire-larmes country classiques.
Je me rends compte que ces EP années cinquante de Hank Williams sont cotés moins chers que des disques assez quelconques des années 1980 ou 1990. C'est surprenant car ce sont déjà des pièces historiques.


Présentés par June Carter, Anita Carter et Hank Williams interprètent en direct I can't help it (If I'm still in love with you) dans l'émission The Kate Smith evening hour, en 1951.

06 décembre 2014

PIXIES : Debaser


Acquis par correspondance probablement chez Action Records en Angleterre vers 1998
Réf : AD 710 -- Edité par 4AD en Angleterre en 1997
Support : 45 tours 17 cm
Titres : Debaser (Demo) -/- #13 baby (Demo)

Depuis la séparation originale des Pixies, et alors que j'avais à peu près toute leur discographie officielle, j'ai assez bien résisté aux tentations commerciales brandies sous mes oreilles par le groupe et son label 4AD : je n'ai pas acheté la compilation Death to the Pixies de 1997, ni le Pixies at the BBC de 1998 (en tout cas pas avant de le trouver à 1 € dans un vide-grenier en 2012), encore moins les Complete 'B' sides de 2001, ni même le Pixies de 2002 (la moitié inédite de la "Purple tape", l'autre constituant Come on pilgrim, que j'ai écoutée et appréciée en l'empruntant à la médiathèque) et pas non plus le Wave of mutilation - Best of Pixies de 2004. Et vous vous en doutez, si j'ai un tant soit peu résisté aux enregistrements originaux, ce n'était pas pour acheter les différentes parutions en concert ou en studio du groupe reformé...
Mais là, vingt-cinq ans après, j'ai craqué et j'ai acheté Doolittle 25, la réédition en trois CD de Doolittle, que je n'avais jusque-là qu'en 33 tours. Mais bon, 14 € pour trois CD, avec l'un des derniers grands albums post-punk des années 1980, et un grand album de l'histoire du rock tout court, plus les faces B et les Peel sessions d'époque, plus tout l'album en versions démo, la plupart inédites, j'ai hésité mais je me suis laissé tenter. Et je ne regrette pas !
L'occasion pour fêter ça de ressortir ce 45 tours avec deux démos de titres de Doolittle, qui est bien la preuve que je n'ai pas été complètement insensible aux différentes parutions posthumes pendant toutes ces années.
En 1997, pour appuyer la sortie de Death to the Pixies, 4AD a sorti en single Debaser, le titre d'ouverture de l'album, en trois versions, CD studio, CD live et 45 tours démo. Action Records les proposait toutes pour pas cher du tout, alors j'ai commandé le lot. En les recevant, j'ai commencé par pester car j'avais tous les titres du CD live sur le Pixies live des Inrocks, mais il restait trois titres de session radio inédits sur l'autre CD, et surtout ce 45 tours démo.
Debaser, c'est l'un des nombreux grands titres des Pixies. Avec sa rage et sa relecture enfiévrée d'Un chien andalou, c'est du niveau des Buzzcocks avec Howard Devoto au chant et aux paroles, ou de David Thomas faisant de l'avant-garage avec Rocket From The Tombs ou Pere Ubu. La version studio est excellente, mais cette version démo n'a pas grand chose à lui envier, à part un son évidemment moins puissant. On a même droit à des chœurs plus nombreux et plus réussis. Pareil avec #13 baby, qui n'était pas une de mes chansons préférées sur l'album, mais que j'ai appris à mieux apprécier avec cette excellente version démo.
Le 7 juin 1989, on a rempli une voiture avec quelques copains pour aller à Paris voir le concert au Bataclan des Pixies lors de la tournée qui a suivi la sortie de Doolittle. Ce que j'ai retenu du concert, c'est qu'une partie du groupe, Mrs John Murphy en tête, s'est frayé un chemin parmi nous alors qu'on était dans la file d'attente pour entrer. Pour le reste, le son et l'interprétation étaient sûrement irréprochables, mais le concert lui-même et la communication avec le public sans vie moi m'ont laissé froid. J'ai pourtant commis l'erreur d'aller voir Frank Black en concert quelques années plus tard : c'était encore pire. Heureusement il nous reste les disques qui, même des années, continuent à faire des petits...

30 novembre 2014

THE PAGE BOYS : You're my kind of girl


Acquis chez Rough Trade à Londres fin 1983 ou en 1984
Réf : WHAAM 10 -- Edité par Whaam! en Angleterre en 1983
Support : 45 tours 17 cm
Titres : You're my kind of girl -/- In love with you

Je regretterai toujours d'avoir vendu, à la fin des années 1980, mon 45 tours Modesty Blaise de Direct Hits, aux mauvais prétextes qu'il ne me plaisait pas tant que ça et qu'il valait un peu d'argent. J'aurais dû le garder, ne serait-ce que parce que c'était un 45 tours Whaam!, le propre label de Television Personalities. Du coup, il ne me reste que huit des quinze singles publiés par le label (ce qui n'est déjà pas si mal), avec d'excellentes choses, Three wishes de TV Personalities, le Gifted children, le premier Pastels, le premier 1000 Mexicans, le Khartomb et d'autres qu'il faudrait que je réécoute mais dont je ne garde pas un grand souvenir, les disques de Le Mat et Marble Staircase.
Et le huitième, c'est donc cet unique disque de The Page Boys (leur discographie est complétée par un troisième titre sur la compilation Whaam! All for art and art for all), et on a affaire à une pépite pure pop, comme dirait Nick Lowe.
Comme presque tout ce qui touche aux Television Personalities, il y a là une fascination extrême pour les années 1960, il suffit de regarder les deux côtés de la pochette, mais ce disque est aussi bien de son époque, avec un son bricolé maison à base de boite à rythmes et de synthés en plus des guitares.
Le groupe était un duo formé de Colin Gregory et Alan Walmsley, originaires du West Yorkshire si j'en crois l'adresse au dos du disque.
Côté paroles, comme les titres le laissent deviner, on est dans la chanson d'amour au niveau des premiers Françoise Hardy, et côté musique, c'est de la pop très réussie, aussi bien dans l'interprétation musicale, le chant et même la production, malgré ou plutôt à cause du côté ultra cheap.
You're my kind of girl fonctionne notamment grâce à sa petite ligne de guitare cristalline, au son de cuivres (je n'arrive pas à imaginer que ça pourrait être de vrais instruments) et aux deux breaks qui suivent le refrain ("You're my kind of girl, wow wow wow wow" : c'est vraiment du basique) avant que ça reparte de plus belle. Je suis presque étonné que Saint Etienne n'ait pas encore eu l'idée de reprendre cette chanson qui leur conviendrait parfaitement.
In love with you utilise les mêmes ingrédients, avec un chant à deux voix encore plus réussi, et est tout aussi bien.
Courant 1984, les TV Personalities ont accepté une somme d'argent du management du groupe Wham pour accepter d'arrêter leur label. Dès 1985, ils en ont lancé un nouveau, Dreamworld. Parmi les toutes premières sorties du label, il y avait le premier disque de One Thousand Violins, un nouveau groupe au sein duquel on retrouvait les deux membres des Page Boys. Je n'ai jamais écouté leurs productions, mais le groupe a sorti avec un certain succès trois singles chez Dreamworld, et d'autres un peu ailleurs avant de se séparer en 1987. Une anthologie, Halcyon days, est parue récemment chez Cherry Red.
Par la suite, Colin Gregory a fondé le groupe baggy The Dylans, qui lui a eu un grand succès. Malheureusement, Alan Walmsley est mort en 1992.


Une publicité pour Whaam! Records parue dans la presse en 1983.

23 novembre 2014

SOUCOUPES VIOLENTES : Et pour un oui et pour un non


Acquis chez Royer à Epernay le 6 septembre 2014
Réf : NEW 134 CD -- Edité par New Rose en France en 1990
Support : CD 7,5 cm
Titres : Et pour un oui et pour un non -- Cracher dans la soupe -- Les roses fânées

Chez Royer, régulièrement depuis 2011, ils continuent de sortir de vieux disques de leurs réserves pour les solder. Souvent des vinyls, avec beaucoup de disques de variétés, mais aussi des CD ces derniers temps. En septembre-octobre, j'ai été bien content d'y trouver quelques disques, dont ce maxi des Soucoupes Violentes. Il m'a fallu quelques jours pour me rendre compte que j'avais déjà ce disque dans son édition maxi-45 tours (acheté neuf, visiblement, mais je ne sais plus du tout où et quand), mais même si je m'en étais souvenu, à 50 centimes j'aurais quand même acheté ce mini-CD glissé dans une boite de taille normale avec son adaptateur. Je croyais aussi ne pas avoir déjà chroniqué de disque de ce groupe, mais ils occupaient, avec une reprise de Love potion #9, une face d'un 45 tours Nineteen partagé avec Ben Vaughn.
Ce disque, entièrement chanté en français, est produit par Elliott Murphy, qui était alors leur compagnon de label. Après Marc Police des Wampas et Yves Calvez des Coronados sur les deux premiers albums, ça leur fait une belle brochette de producteurs. Dans leur discographie, ce single s'inscrit pile entre les albums Va savoir (1989) et A des années lumières (1991), le dernier avant la séparation du groupe première période, et il ne figure sur aucun des deux.
Et pour un oui et pour un non est une excellente chanson pop-rock, accompagnée par ce qui sonne à mes oreilles comme une sorte de vibraphone mais est peut-être un clavier. Côté paroles, il est question d'opinion et d'indécision : "Pour faire preuve d'imagination, ceux qui changent pas, c'est des cons, et moi suivant les saisons, du monde je me refais une vision.Et pour un oui et pour un non, on change tout le temps d'opinion, et pourtant, pourtant, à quoi bon.". Selon une biographie officielle, une vidéo de cette chanson a été diffusée par Canal Plus, mais je n'en ai pas trouvé trace en ligne. Elliott Murphy a aussi été leur invité pour un concert à l'Elysée-Montmartre.
Cracher dans la soupe, encore un bon titre de chanson trouvé par Stéphane Guichard, au son plus rock, n'est pas mal non plus, avec les choeurs et l'orgue sur le refrain.
Le disque se clôt avec une reprise d'une chanson écrite par Gainsbourg pour Dutronc. Les roses fânées a été créée en 1972 à la télévision par Dutronc, Gainsbourg et Birkin. Une version en studio a finalement été incluse sur l'album de Dutronc sorti en 1975. Arrivé en 1990, il devenait peut-être un peu convenu de reprendre Gainsbourg, mais cette ode à un gigolo est suffisamment de mauvais goût pour faire sourire ("J'aime les vieilles peaux, j'aime les vieilles paumées" - avec "Gigolo" en réponse en choeur) et, comme toute reprise, elle a l'intérêt de fixer les points de référence du groupe.
Les Soucoupes Violentes volent à nouveau depuis 2007, avec Stéphane Guichard comme seul membre original. L'album S'attendre au pire est sorti en 2009. Un nouveau, Sur tes lèvres (vingt-sept ans après Dans ta bouche... !), est sur le point de sortir. On y trouvera Trop méchante, avec Didier Wampas comme invité.

22 novembre 2014

JULIAN COPE : I come from another planet, baby


Acquis par correspondance probablement chez Action Records en Angleterre à la fin des années 1990
Réf : ECS CD 22 -- Edité par Echo en Angleterre en 1996
Support : CD 12 cm
Titres : I come from another planet, baby -- How do I understand my motorman ? -- If I could do it all over again, I'd do it all over you

J'ai arrêté d'acheter les albums de Julian Cope au moment de leur sortie après la déception My nation underground. Par la suite, j'ai récupéré deux bons disques, Peggy suicide et 20 mothers, et les singles que j'ai continué d'acquérir me font dire qu'il y a évidemment de très bonnes choses sur Jehovahkill, Autogeddon et Interpreter.
La preuve, avec ce premier single extrait d'Interpreter en 1996, un album qui, outre l'intérêt marqué par Cope pour les mégalithes, la cosmologie et pas mal de signifiants néo-hippies, est en partie inspiré par sa participation aux grands mouvements de protestation qui ont eu lieu contre en 1995 et 1996 contre les travaux de la déviation de Newbury et les destructions forestières qu'ils allaient entraîner.
Même s'il était déjà embarqué dans l'enregistrement de longues pistes ambiantes et ésotériques, Cope n'avait pas perdu la main en 1996 pour composer d'excellentes pépites psyché-pop. C'est le cas ici avec I come from another planet, baby et on s'en rend compte dès l'intro, avec les deux guitares, l'une acoustique et l'autre saturée (on n'est pas si loin de Sunspots). Ça démarre ensuite sur un rythme assez rapide bizarrement dédoublé sur la caisse claire. Ensuite, un couplet à deux étages assez rapidement expédié avant le refrain emballant, et sa prononciation exagérée de "baby". Il y a des bruitages dans tous les sens sur les refrains suivants, un petit riff de synthé, et le tout est emballé et pesé magistralement en 3'20.
La bonne surprise c'est que, même s'il n'a pas été retenu pour l'album, le deuxième titre, How do I understand my motorman ? est de la même excellente veine, celle des deux premiers albums solo, avec un excellent refrain aux voix doublées. Une chanson à inclure dans la compilation future (si elle existe déjà, je l'ai ratée) des excellentes faces B de Julian Cope.
Patatras par contre pour le dernier titre, If I could do it all over again, I'd do it all over you, neuf minutes éprouvantes d'illustration sonore sur laquelle Cope débite, en parlant, une longue histoire où il est entre autres question d'un gars qui ressemble à Boris Becker, avec quand même des saillies amusantes ("Wouldn't it be great if Tangerine Dream had been really sexy ?"). Mais il y a pire, et surtout plus long : le CD 2 de ce single, un remix dans le style "Wessex post-ambient therapy musics" de I come from another planet, baby intitulé Ambulence, dans lequel on n'entend que quelques bribes de la chanson originale et qui dure plus de trente-deux minutes ! Et ce deuxième disque, comme c'était pas cher, j'avais commis l'erreur de l'acheter en même temps que cet excellent single.


17 novembre 2014

THE SHAKY HANDS : Lunglight


Offert par Philippe D. à Paris le 3 juillet 2014
Réf : VVR1051942P -- Edité par Memphis Industries en Angleterre en 2008
Support : CD 12 cm
13 titres

Voilà donc le disque de The Shaky Hands dont l'écoute m'a donné envie de ressortir mon Duende de Shrimp Boat.
Comme pour beaucoup des disques offerts par Philippe D. l'été dernier, c'est un CD promo sous pochette cartonnée, sans aucune indication sur la composition du groupe et la production du disque. Et à chaque fois je profite de l'occasion pour découvrir ces groupes inconnus avec le minimum de préjugés, en évitant absolument de me renseigner sur eux avant d'avoir écouté le disque.
Là, dès les premières secondes, j'ai senti qu'il y avait quelque chose de spécial. Un rythme surprenant, des sons décalés, qui pourraient aussi évoquer Pavement, mais c'est donc bien à Shrimp Boat que j'ai pensé lors de cette première écoute. Il n'y a pourtant sûrement aucun rapport direct, et je parierais bien que les membres de The Shaky Hands ne les connaissent pas mais, même à presque une génération d'écart, avec les mêmes ingrédients et en essayant pareillement de se tenir à la marge des normes de la chanson pop-rock, on arrive à un résultat assez proche dans l'esprit, même si Les Mains Tremblantes sont sûrement un peu moins décentrées que le Bateau à Crevettes.
The Shaky Hands est un groupe de Portland, qui a sorti quatre albums pendant son existence de 2003 à 2011. La formation était des plus volatiles : la simple lecture des multiples changements de personnel dans leur biographie a commencé à me donner le tournis. Lunglight est leur troisième album et c'est un excellent disque, qui commence par un enchaînement imparable de quatre titres, A new parade, Loosen up, Air better come et We are young, qui n'est pas sorti en single mais pour qui une vidéo a été diffusée. Par la suite, comme avec Shrimp Boat, les rythmes varient, avec des sonorités un peu reggae (No say), voire tropicales (Show me your life). Le groupe se lâche un peu sur la fin avec trois titres un peu plus longs qui s'enchaînent aussi très bien, Love all of, Wake the breathing light et Oh no.
Après Deerhoof et The Shaky Hands, j'espère qu'il me reste encore d'aussi bonnes découvertes à faire dans la pile de disques de Philippe !

Des extraits de tous les titres du disque sont en écoute chez Juno.

15 novembre 2014

SHRIMP BOAT : Duende


Acquis probablement chez Parallèles à Paris en 1992
Réf : R27882 | A-HAON 022-2 -- Edité par Rough Trade | Bar None en Angleterre en 1992
Support : CD 12 cm
16 titres

Cette semaine, l'écoute d'un album de The Shaky Hands, l'un des disques offerts par Philippe D. cet été, m'a donné l'envie de réécouter cet album de Shrimp Boat. J'ai longtemps pensé que Duende était leur premier album, mais en fait c'est juste le premier distribué par chez nous. Avant ça, depuis 1988, ils avaient sorti deux cassettes, Some biscuit et Daylight savings, et un album, Speckly.
Quand on a reçu Duende à La Radio Primitive en mars 1992, j'en ai passé un extrait trois semaines de suite dans mon émission Vivonzeureux!, et je crois bien qu'on en passait aussi dans Sueur d'hommes avec Raoul Ketchup et Phil Sex.
Shrimp Boat est un groupe de Chicago, associé par la suite au post-rock car deux de ses membres ont fondé The Sea and Cake, mais si Shrimp Boat fait du post-rock, alors je découvre à l'instant que j'adore le post-rock ! (Seul le dernier titre, Tartar's mark est assez jazz et free pour être insupportable à mes oreilles).
Non, la recette de Shrimp Boat, avec des ingrédients simples (basse, guitare, batterie, plus un peu de banjo, de saxophone et de trompette joué par les quatre membres du groupe), c'est de bricoler (voire d'improviser en studio, mais ça ne se sent pas) des compositions attrape-tout, associant souvent rythmes bancals et sons discordants. J'ai acheté le disque en CD peu de temps après sa sortie, mais en l'écoutant il m'est souvent arrivé de vouloir vérifier s'il tournait à la bonne vitesse !
Le disque s'ouvre avec un instrumental, Back to the Ukraine (le pays était à la une de l'actualité pour d'autres raisons en 1991, lorsqu'il a retrouvé son indépendendance). Lorsque Jing jing démarre, on croit que le disque va être entièrement instrumental, mais non, on découvre au bout de quelques secondes le chant légèrement étranglé, de Sam Prekop ou Ian Schneller.
Il y a dans ce disque des éléments de folk, de blues, de rock bien sûr. On pense tour à tour à des Feelies plus déjantés, à des Feelings moins braillards, à Camper Van Chadbourne aussi, ou à Califone et aux disques instrumentaux de Calexico.
Je n'ai trouvé qu'un seul titre en ligne sur YouTube, l'excellent Sunday crawls along, avec une partie instrumentale qui me semble bien faire référence à Egyptian reggae.
"Duende", ça sonne espagnol, et effectivement ça veut dire "lutin". Aucun rapport, mais le titre du disque que je préférais à l'époque, Chimp, me fait furieusement penser aujourd'hui aux Pixies, ceux excités et dérangés de Come on pilgrim. Parmi mes autres titres préférés, il y a aussi New song waltz, River of wine avec ses cuivres et l'instrumental Duende.
Je m'étais procuré peu de temps après sa sortie l'abum suivant, et le dernier du groupe, Cavale, mais il ne m'avait pas plu autant.

Des extraits de trente secondes des titres de Duende sont en écoute chez AllMusic.
Aum Fidelity a édité en 2004 un coffret d'archives de Shrimp Boat, Something grand, et a ressorti Speckly. Le label japonais Bomba a lui réédité les autres disques, qu'on trouve assez facilement à prix correct.
A lire : un entretien de Ian Schneller, de Shrimp Boat (en anglais), avec Quentin Legrand pour Hyacinth Magazine.

09 novembre 2014

JOHN LEE HOOKER : Shake it baby



Offert par Fabienne M. au vide-grenier collections de Dizy le 1er novembre 2014
Réf : 10 644 -- Edité par Brunswick en France en 1963
Support : 45 tours 17 cm
Titres : Shake it baby -- Hey baby -/- I'm nervous -- I wanna see my baby

Le week-end dernier, il y avait une petite bourse aux collections à Dizy. Peu de disques, sauf sur le stand d'un grand amateur, qui vend des doubles de sa collection à prix raisonnable. J'avais longuement hésité devant ce superbe EP de John Lee Hooker, à la très belle pochette en parfait état, à peine plus cher que ce que je mets habituellement pour un disque. On était à peine sorti que je commençais déjà à regretter de ne pas l'avoir pris et Fabienne a abrégé mes tourments en décidant sur le champ de me l'offrir. Demi-tour, donc, et achat du disque, avec en cadeau bonus par Michel, le vendeur, la pochette vide d'un autre superbe EP, enregistré lui aussi lors du American Folk Blues Festival, mais un an plus tard, en 1963.
Bon, je ne cacherais pas que j'ai eu un instant de déception une fois arrivé à la maison. J'avais vérifié l'état du disque (nickel) et repéré que c'était le bon label, Brunwick, le bon titre général, American Folk Blues Festival, et le bon artiste principal crédité (on reviendra sur ce point), John Lee Hooker. J'avais aussi vu qu'il y avait bien "baby" dans le premier titre, mais dans le feu de l'action je n'avais pas noté qu'il s'agissait non pas de Let's make it baby, le disque correspondant à ma pochette, mais de Shake it baby, enregistré le même jour et sorti juste avant. Fâcheux, mais je me suis vite consolé car 1) les quatre titres du EP Shake it baby sont vraiment excellents et 2) la pochette de Let's make it baby est bien plus réussie que l'autre.
J'ai toujours connu les tournées American Folk Blues Festival lancées par le duo Horst Lippmann et Fritz Rau, par les disques qui ont été édités au fil des années et aussi par l'annonce des éditions qui ont eu lieu dans les années 1980, mais je ne m'y étais jamais intéressé dans le détail et je n'étais pas suffisamment conscient de l'importance qu'elles ont eues pour la diffusion du blues en Europe. Il suffit de dire que la première édition, en 1962, au cours de laquelle ce disque a été enregistré, alignait John Lee Hooker, donc, mais aussi Memphis Slim, Willie Dixon, Helen Humes, Shakey Jake, Sonny Terry et Brownie McGhee, Magic Sam et T-Bone Walker ! Le tout pour une grosse quinzaine de dates en octobre, surtout en Allemagne, mais aussi en Suisse, Autriche, Angleterre et à Paris, ponctuées d'enregistrements radio et télé et de jam sessions dans des clubs une bonne partie de la nuit après les concerts.
Mais le 18 octobre 1962, ce n'est pas dans un club que tous les musiciens de la tournée se sont retrouvés (à l'exception d'Helen Humes, qui avait un contrat d'exclusivité avec un label), mais au studio Deutsche Grammophon de la ville, pour une session qui a duré jusqu'à cinq heures du matin, dont l'enregistrement a fait l'objet d'un album-souvenir douze titres, le premier de la série. Cet album a été édité en France par Polydor.
L'enregistrement s'est donc fini le 19 au matin à Hambourg. Le 19 au soir, toute la bande était à Paris et faisait un bœuf mémorable une bonne partie de la nuit aux Trois Maillets. Le 20 au soir, ils étaioent à L'Olympia pour deux concerts mémorables, à 18h et minuit. Le compte-rendu de cette soirée par Christian Casoni dans le magazine Blues Again est captivant (Haw! Haw! Haw! Haw! 1962: John Lee Hooker à l’Olympia).
Avant l'album, Brunswick a édité en France deux EP tirés de la session du 18 octobre 1962, Shake it baby et Let's make it baby. Ces deux disques ont été très vite repressés sous étiquette Polydor, comme l'album. Les deux EP sont crédités au seul John Lee Hooker, mais les renseignements discographiques fournis au dos des deux pochettes indiquent bien que, dans les deux cas, il n'est présent comme artiste principal (guitariste-chanteur) que sur le premier titre.
Dans le cas qui nous préoccupe (le disque que j'ai), il s'agit de Shake it baby, un excellent rhythm and blues rapide qui, j'ai été surpris de l'apprendre, a eu un très bon succès commercial en France (100 000 exemplaires auraient été vendus). A tel point qu'il a une importance culturelle particulière puisque c'est sur Shake it baby que Claude Brasseur, Samy Frey et Anna Karina dansent dans une scène fameuse de Bande à part de Jean-Luc Godard. Dans le film, le titre a été réorchestré par Michel Legrand, avec de l'orgue et des cuivres notamment, mais dans le reportage télé réalisé sur le tournage de la scène, c'est bien la version de Hooker qui est diffusée. Hooker enregistrera une vraie version studio de Shake it baby en 1965 pour son album It serve you right to suffer.
Les trois autres titres n'ont rien à envier à Shake it baby. I wanna see my baby de T-Bone Walker pourrait même être la suite du premier. Hey baby de l'harmoniciste Shakey Jake est un excellent blues. Quant à I'm nervous de Willie Dixon, un titre à la fois excellent et hilarant, sorti initialement sur son premier album Willie's blues en 1959, il y a un intérêt supplémentaire car il ne figure pas parmi les douze sélectionnés pour l'album.
Les versions de Hey baby et I'm nervous présentées en vidéo ci-dessous ne sont pas celles du disque, mais elles ont été enregistrées au tout début de la tournée, le 4 octobre 1962 à Baden-Baden, pour l'émission Jazz gehört und gesehen de Horst Lippman.
Excellent disque donc, et superbes pochettes. Maintenant, si vous voulez me faire des cadeaux, sachez qu'il me manque la pochette du Brunswick 10 644 ainsi que les disques du Brunswick 10 650 et du Fontana 466.024 ME !