30 juillet 2017

SANDIE SHAW : Puppet on a string


Acquis sur le vide-grenier de Dizy le 12 mai 2017
Réf : PNV 24 185 -- Édité par Pye en France en 1967
Support : 45 tours 17 cm
Titres : Puppet on a string -- Tell the boys -/- I don't need anything -- Keep in touch

Allez, on va innover ici avec notre premier feuilleton de l'été. Oh, pas une saga interminable, juste quatre épisodes, dont un double, pour revivre les aventures discographiques françaises de la participation de Sandie Shaw à l'Eurovision en 1967. Un format réduit car on ne s'intéressera qu'aux EP, pas aux 45 tours deux titres ni aux albums... L'idée m'en est venue quand j'ai acheté ce disque au printemps dernier et que je l'ai confronté à d'autres qui figuraient déjà dans ma collection.
L'Eurovision, c'est un concours international, mais dans chaque pays qui participe, c'est visiblement une grande affaire nationale. Je suis ça de très loin, mais ces dernières années il m'a semblé que par chez nous divers systèmes plus ou moins élaborés ont été mis en place pour sélectionner le représentant français. Je croyais que c'était assez nouveau, mais il ne semble pas : en Angleterre, c'est depuis 1957, soit dès l'année de la deuxième édition du concours, qu'il existe une émission télévisée pour sélectionner la chanson.
En 1967, c'est Sandie Shaw qui avait été retenue pour représenter l'Angleterre et elle a chanté les cinq chansons proposées dans le cadre de A song for Europe, diffusée le 25 février dans le Rolf Harris Show. Ensuite, le public a pu voter par courrier et les résultats ont été annoncés le 4 mars.
C'est donc Puppet on a string qui est arrivée en tête, devant Tell the boys. Les trois autres titres présentés étaient I'll cry myself to sleep, Had a dream last night et Ask any woman.
Il parait que Puppet on a string était la chanson parmi les cinq qui plaisait le moins à Sandie Shaw ! Elle est signée Bill Martin et Phil Coulter. Un peu plus tôt cette année, en commentaire de ma chronique d'une version orchestrale de Puppet on a string par la Fanfare des Saints-Pères, quelqu'un a indiqué que ce tube est un pompage de Mademoiselle Adeline, une chanson créée par Jean Tranchant en 1936, avec un accompagnement par Django Reinhardt et Stéphane Grappelli. Effectivement, à l'écoute, j'ai entendu quelques similitudes dans le refrain, notamment le "hoquettement", mais, ne l'ayant jamais vu mentionné nulle part, je doutais un peu qu'il y ait eu un procès gagné par Jean Tranchant à ce sujet. L'information figure pourtant chez Le Hall, Centre National du Patrimoine de la Chanson, on peut donc lui accorder du crédit.
La finale du concours de l'Eurovision eut lieu le 8 avril, à Vienne en Autriche. Il est donc très probable que le disque qui nous intéresse aujourd'hui, la première édition française en EP de Puppet on a string, est sorti entre le 4 mars, date de l'annonce du choix de la chanson, et le 8 avril, date de la finale.
On note, peu visible en blanc sur la pochette, au-dessus de "Puppet on a string", la mention "Chanson anglaise de l'Eurovision 1967". Cette mention est reprise au dos de la pochette et sur la rondelle du disque.
Comme souvent avec les EP quatre titres français, on trouve ici les faces de deux 45 tours deux titres anglais, celui avec Puppet on a string et Tell the boys, et celui sorti un peu plus tôt début 1967 avec I don't need anything et sa face B Keep in touch.
Rétrospectivement, ce n'est pas surprenant que Puppet on a string ait remporté le concours haut la main cette année-là. C'est une chanson simple au possible (une marche ?), entraînante... On imagine bien des foules la chanter à des mariages ou des fêtes de la bière ! En tout cas, son succès a relancé la carrière de Sandie Shaw, qui était un peu au creux de la vague en 1966.
Tell the boys est la chanson qui était arrivée deuxième lors de la sélection. On est peut-être plus dans le style habituel de Sandie Shaw, avec des paroles qui restent au degré zéro du yéyé. Idem pour I don't need anything, en version slow, avec cordes et cuivres et tout le bastringue.
Ma préférée des quatre est peut-être la dernière, Keep in touch. Bizarrement, cette face B anglaise de 1967 était sortie en France dès 1966, en français et en titre principal d'un EP sous le titre Je ne marche pas. Effectivement, je crois que ça n'avait pas marché !
Je ne sais pas quel a été le succès en France de ce disque dès son lancement, avant même la publicité générée par le succès à l'Eurovision, mais vu que cette édition a été en vente peu de temps, elle est sûrement (et très relativement) plus rare que certaines des suivantes.

(à suivre)


Sandie Shaw, Puppet on a string, à l'Eurovision en 1967.


Sandie Shaw, Puppet on a string, hors concours et en partie en espagnol, à l'Eurovision en 1970.


Sandie Shaw, Keep in touch.

27 juillet 2017

MENDELSON : Sciences politiques


Acquis par correspondance via Ici d'Ailleurs en juillet 2017
Réf : IDA129 -- Édité par Ici d'Ailleurs en France en 2017
Support : CD 12 cm
12 titres

Après Giscard Bongo, on va s'intéresser à un autre type de chanson politique.
Je n'ai jamais suivi de près le parcours de Mendelson. Pourtant, grâce à Une rentrée 97, une excellente compilation des Inrockuptibles, j'ai connu et fort apprécié un de leurs premiers titres, Je ne veux pas mourir. Mais par la suite, je n'ai jamais eu la curiosité d'écouter les albums de Mendelson, ni le disque solo de Pascal Bouaziz ou celui de son autre groupe Bruit Noir parus tous les deux en 2015.
Mais quand même, j'ai prêté attention aux communiqués annonçant la sortie du sixième album Sciences politiques au printemps dernier et, quand je l'ai vu parmi les nouveautés de la Médiathèque, je l'ai emprunté sans hésiter.
Comme j'aime bien le faire, j'ai écouté le disque en voiture, sans avoir cherché à en savoir plus avant en lisant le livret ou en me baladant en ligne.
J'ai aimé ce que j'entendais dès les premiers morceaux. C'est au quatrième, La guerre (mais je n'avais pas les titres sous les yeux), que j'ai reconnu une transposition en français et en 2015 du 1969 des Stooges. Arrivé au sixième titre, La carrière, il ne m'a fallu que quelques instants pour reconnaître une adaptation du Careering de PIL, déjà repris dès 1980 par l'ancien batteur du groupe avec son projet Brian Brain. Juste après, j'ai eu du mal à placer le titre de Lou Reed qui était repris en tant que Les héritiers (Men of good fortune), mais à ce moment la brume de mon cerveau a commencé à s'éclaircir et, bien avant que ne débute l'excellente version presque électro-pop de That's entertainment de The Jam (Les loisirs), il m'était revenu que Sciences politiques est un album entièrement constitué de reprises.
Mais pas n'importe quelles reprises. Des reprises comme je les aime quand il s'agit de titres en anglais joués par des français, des reprises comme j'ai souvent eu l'occasion d'en imaginer, voire même à mon petit niveau d'en réaliser, c'est à dire des versions qui ne se contentent pas de répéter bêtement les paroles originales sans les comprendre ou de les traduire littéralement, mais qui cherchent à les transposer et à les adapter à notre époque et au contexte français.
Pascal Bouaziz s'est attelé à cet exercice et c'est une réussite magistrale, avec à la fois un projet parfaitement construit qui, du titre générique de l'album à ceux choisis pour chacun des morceaux, donne une cohérence à un ensemble de sources assez divers, et une réalisation artistique qui produit un disque qui me plaît de plus en plus à chaque écoute et qui est bien plus varié que ce à quoi je m'attendais.
En effet, j'imaginais des choses dans la veine de Michel Cloup (un ami, salué dans les crédits), Rodolphe Burger, Alain Bashung ou Gérard Manset, et il y a de ça effectivement, par exemple dans Les peuples (Almost like the blues de Leonard Cohen), Le soulèvement (The ghost of Tom Joad de Bruce Springsteen)  ou La dette (version de Viet vet d'Alan Vega, le petit frère de Frankie Teardrop de Suicide), mais il y a aussi le très enjoué et déjà cité Les loisirs, des titres très électriques comme La nausée (Youth against fascism de Sonic Youth) et Le capitalisme ("Nous sommes tous des putes", version que je préfère à l'originale par The Pop Group) et un subtilement funky La panique (Inner city blues de Marvin Gaye). Les deux autres titres pour compléter la douzaine sont La liberté (Left on man de Robert Wyatt) et La décence (What are their names de David Crosby).
Je donne la précision des titres originaux car ça me semble important. C'est d'ailleurs le seul reproche que j'ai à faire à ce disque, le fait que cette information ne figure pas dans les crédits. Il y a juste la mention "Textes et musiques librement adaptés et tous droits réservés aux auteurs et compositeurs originaux", suivie de la liste de ces auteurs, mais tout le monde ne connaît pas les chansons originales et ça n'aurait pas pris trop de place de mentionner leurs titres (A ce sujet, je n'ai pas vraiment d'excuse pour ne pas avoir reconnu les trois premiers titres, car je les avais tous déjà écoutés au moins une fois !).
Mais c'est un reproche mineur, d'autant qu'on trouve l'information manquante en ligne en vingt secondes. Et surtout, Pascal Bouaziz a largement compensé en proposant Extension politique, une série de douze vidéos, où il revient en profondeur sur le projet de l'album, les sources et les réflexions qui l'ont nourri, les différents choix, les problèmes d'adaptation... C'est passionnant (mais à regarder après avoir écouté le disque, si possible), à la fois très informé et très drôle. Ça montre que Pascal Bouaziz, comme beaucoup d'entre nous, s'interroge de façon lucide sur le monde actuel et sur des choix de vie en cohérence avec ces analyses.
Dans ces vidéos, mais aussi chez Télérama et Le Monde, on apprend que le projet Sciences politiques a débuté à l'occasion d'une résidence dans un collège à Bobigny en 2014 et 2015. Au moins douze autres titres ont été envisagés ou même enregistrés (et plus ou moins ratés, parait-il), dont Shipbuilding et New information order de Wyatt, Concrete jungle de Bob Marley et les Wailers, et des chansons de Prince, James Brown, Sly Stone, The Smiths et The Housemartins.
On peut donc espérer un jour un petit complément à Sciences politiques, d'autant qu'on n'a guère l'occasion de prolonger son plaisir en concert car Mendelson n'a joué pour l'instant l'album que quatre fois sur scène et qu'aucune autre date n'est annoncée pour l'instant.




25 juillet 2017

TCHIBANGA : Giscard Bongo


Acquis sur le vide-grenier de Vertus le 14 juillet 2017
Réf : 2056-550 -- Édité par Polydor en France en 1976
Support : 45 tours 17 cm
Titres : Giscard Bongo (Bienvenue au Président Giscard d'Estaing -/- Nini

On trouve les disques africains que l'on peut...
Mais, les bonnes trouvailles se faisant rares en brocante, j'ai été bien content d'acheter le 14 juillet trois 45 tours à 50 centimes pièce sur un même stand : celui-ci, plus un EP de Marcel Bianchi que je ne connaissais pas du tout et une édition belge de Ça plane pour moi, avec une pochette différente et Pogo pogo encore indiqué comme face A sur la rondelle.
Je n'ai pas trouvé d'autre disque que celui-ci crédité à Tchibanga.
Il est clair que ce 45 tours a été édité à l'occasion du voyage officiel de Valéry Giscard d'Estaing au Gabon en août 1976, relaté dans le journal télévisé d'Antenne 2 le 6 août (à partir de 1'25).



En plus des danses, des cérémonies, des boubous avec les photos des deux présidents imprimées sur la poitrine, il y a donc eu l'édition de cette chanson, Giscard Bongo.
Musicalement, elle est à la fois entraînante et sans surprise. Côté paroles, c'est la simplicité et l'évidence-mêmes :
  • Le nouveau président de tous les Français
  • L'ami de Bongo et des Gabonais
  • L'ami de l'Afrique et des Africains
  • Ce président-là, c'est Giscard d'Estaing
  • Pour gouverner la France et les Français
  • La France a dit : Giscard à la barre
  • Pour gouverner le Gabon et les Gabonais
  • Nous disons « Bongo à l'avant du bateau »

  • Bongo, c'est l'ami de Giscard
  • Giscard est l'ami de Bongo
  • Bongo, c'est l'ami de Giscard
  • La France est l'amie du Gabon
La surprise vient quand on regarde les crédits de Giscard Bongo. En effet, la chanson est co-signée "A. Bongo - J. Ondo" et un petit tour sur Discogs nous apprend vite que cet A. Bongo est bel et bien Ali Bongo, qui est depuis 2009 le Président du Gabon, comme avant lui son Papa Omar !
Ali Bongo avait 17 ans en 1976, et à l'époque il s'était lancé dans la chanson, comme avant lui sa maman.
Avec Jimmy Ondo, il a sorti un autre 45 tours, Si dans la vie / Restons gabonais restons africains. En 1978 il a même édité un album solo, A brand new man, apparemment funky, en partie produit et arrangé par Fred Wesley des JB's. Il était donc tout désigné pour composer cette ode à Giscard !
La face B, Nini, est un reggae signé par King-Joe Bale, apparemment lui-même fils de diplomate et neveu du président zaïrois Mobutu !
En cherchant un peu, je me suis rendu compte que, au cours de son septennat, plusieurs autres 45 tours en l'honneur de Giscard ont été édités lors de ses voyages dans des contrées éloignées de la métropole. Je n'ai pas trouvé trace de celui de Côte d'Ivoire avec l'orchestre de Manu Dibango mentionné dans une chronique de France Inter à l'occasion des 90 ans de VGE mais, des Antilles à l'Océan Indien, on peut écouter La biguine à Giscard par Richard Cassin (auteur Gérard La Viny), Séga...Destin  par Luc Donat, Séga Giscard 81 par Rose Thérèse, Le Président aux Îles - Séga Giscard par Michel Adélaïde, Marie-Armande et Jean-Claude Moutou ou Bienvenue Papa Giscard d'Estaing par Tétin !
Mais l'amitié ça va ça vient et, à la mort d'Omar Bongo, Valéry Giscard d'Estaing a indiqué avoir rompu avec le président gabonais (avant d'être contredit) quand il avait appris que celui-ci finançait la campagne de Jacques Chirac pour l'élection de 1981 ! Alors, pour des effets comiques, on pourrait imaginer à certaines époques la transposition du refrain "Bongo, c'est l'ami de Giscard, Giscard est l'ami de Bongo" avec d'autres paires politiques dont l'entente a mal tourné, comme Hitler et Staline, Mitterrand et Saddam, Sarkozy et Kadhafi, Sarkozy et Assad, voire même bientôt, qui sait ?, Macron et Trump.
Sinon, pour ce qui est des chansons politiques africaines, je préfère celles de Franklin Boukaka.

22 juillet 2017

FRANÇOISE HARDY : J'ai coupé le téléphone


Acquis peut-être chez Assaut dans la Marne dans les années 1980
Réf : V. 45-1655 -- Édité par Vogue en France en 1969
Support : 45 tours 17 cm
Titres : J'ai coupé le téléphone -/- Les doigts dans la porte

L'autre jour, je suis tombé sur une vidéo que quelqu'un avait partagée de Françoise Hardy mimant sa chanson Les doigts dans la porte en bord de mer. Ça m'a surpris car cette chanson n'est sortie qu'en face B d'un 45 tours et je n'imaginais pas qu'il ait pu y avoir un passage télé à l'époque pour en faire la promotion.
Je connais bien ce 45 tours dont la face A est J'ai coupé le téléphone car, il y a environ trente ans, je suis tombé sur quatre ou cinq exemplaires de ce disque dans un magasin, qui était peut-être l'un de ceux de la chaîne Assaut à Reims ou Châlons. C'était vraiment pas cher et je les ai pris tous. Depuis, j'en ai donné aux copains et peut-être revendu un ou deux. Mais j'en ai gardé un, bien sûr.
Ce disque est l'un des tous derniers publiés par Françoise Hardy chez Vogue. Quand j'ai fait le calcul, j'ai eu comme un vertige de me rendre compte qu'elle n'avait que vingt-cinq ans en 1969 quand ce disque est sorti. C'est impressionnant puisque, depuis 1962, quelques mois avant les débuts des Beatles, elle avait multiplié les succès (souvent écrits par elle) et sorti des dizaines de 45 tours et neuf albums !
Les deux titres sont très courts (le plus "long" atteint à peine les deux minutes).
Pour Les doigts dans la porte, c'est Jean-Claude Vannier et son Orchestre qui accompagnent et ça s'entend. La chanson est signée Ariel Silber et Eddy Marnay, mais quand on écoute les paroles on a du mal à s'empêcher de penser à Jacques Dutronc. C'est enlevé, très rythmé et il y plein de cordes (sans surprise, avec Vannier...). Cette chanson a été réenregistrée en 1970 sous le titre Das tut weh sur l'album Traüme, paru uniquement en Allemagne.
J'ai coupé le téléphone est une composition de Françoise Hardy, et Jean-Pierre Sabar et son orchestre l'accompagnent. On est dans un tempo qui lui est plus familier et, dans l'ensemble, ça reste une bonne face A de 45 tours, avec de la guitare électrique et même un peu de sifflement !
Les deux titres de ce 45 tours, ainsi que Comment te dire adieu, ont été inclus en 1970 sur l'édition originale de la compilation Françoise, mais Les doigts dans la porte a été remplacée sur l'édition parue quelques mois plus tard chez La Guilde Internationale du Disque/Concert Hall. C'est évidemment celle que j'ai, dommage.
Comme souvent, la publicité pour les derniers 45 tours Vogue glissée à l'intérieur du disque est assez fascinante. J'y ai notamment repéré J'ai rien à perdre / Je ne sais pas par Les Extrêmes, Grégoire, il est 7 heures par Hippolito et un 45 tours par Les Zora-Gloutons ! Comme quoi, il m'en reste beaucoup, des disques Vogue à découvrir...




14 juillet 2017

SISTER SLEDGE : He's just a runaway


Acquis sur le vide-grenier de Vermand le 16 avril 2017
Réf : 11 676 -- Édité par Atlantic en France en 1981 -- Offert gracieusement par Bata - Ni repris - Ni échangé
Support : 45 tours 17 cm
Titres : He's just a runaway (Version reggae en hommage à Bob Marley) -/- He's just a runaway (Version disco)

A Vermand en avril dernier, le jour où j'ai acheté les compilations Rock of the 80's et Surprise-partie chez mes voisins, j'ai aussi trouvé, à un autre stand, une grosse poignée de 45 tours à 20 centimes, dont ce disque de Sister Sledge.
La notion d'un disque en hommage à Bob Marley en 1981, juste après sa mort, m'a interpellé, mais c'est surtout l'autocollant apposé en travers du côté fendu de la pochette qui m'a décidé à le prendre.
On sait d'emblée que ce disque a été diffusé dans le cadre d'une opération commerciale du chausseur Bata. Ça me rappelle des souvenirs. Dans les années 1970-1980, je savais comme toute le monde en France qu'on ne pouvait pas faire un pas sans Bata, mais surtout je connaissais le club de basket de Bataville en Lorraine, qui jouait souvent contre l'Espé Châlons.
Ce n'est que des années plus tard que j'ai eu la confirmation que c'est bien en référence à l'entreprise Bata que la commune s'appelait Bataville, mais je n'imaginais pas à l'époque qu'il y a eu une trentaine de cités Bata dans le monde !
Il n'y a pas grand chose d'écrit sur l'autocollant, mais suffisamment pour que ça pose question. "Offert gracieusement par Bata", est-ce que ça ne serait pas un peu pléonasmatique ?
Et surtout "Ni repris - Ni échangé" ! Alors, voilà une boite qui fait un cadeau à ses clients, mais qui veut d'emblée se protéger contre toute plainte ou récrimination. Le cadeau il est gratuit gratuit, mais surtout on ne veut plus en entendre parler. Qu'il soit à la bonne taille ou non, que la musique vous plaise ou non, donner c'est donner et qu'on n'en parle plus ! Surprenant...
Bon, alors on va l'essayer, ce 45 tours.
Il y a la même chanson sur les deux faces. En face B, la version disco originale de He's just a runaway, un titre de l'album All American girls, démarre plutôt bien avec une intro électro-rock. La suite est un peu moins bien, mais c'est un titre qui passe assez bien la rampe, dans le style disco habituel du groupe.
La face A est donc une nouvelle version de la chanson, dans un style reggae, en hommage à Bob Marley, mort le 11 mai 1981. Et là, c'est très décevant, car en fait de reggae, on a ici quelque chose qui singe effectivement le style tardif des Wailers, mais qui est tout raide et ne chaloupe pas. On ne dépasse pas le niveau de la curiosité.
L'aînée des soeurs Sledge, Joni, est morte en mars dernier, mais ça n'empêche pas le groupe de continuer à tourner : il sera en concert demain à Londres.



09 juillet 2017

THE CRITTERS : Younger girl


Acquis chez Okazou à Fagnières le 1er juillet 2017
Réf : CKLD 4014 -- Édité par Kapp en France en 1966
Support : 33 tours 30 cm
12 titres

En se garant sur le parking du centre commercial, on a repéré ce dépôt-vente qu'on ne connaissait pas, avec de façon étonnante plusieurs personnes qui faisaient la queue devant le magasin avant l'ouverture.
Après avoir fait nos courses, et bien qu'il se soit mis à pleuvoir à seaux, j'ai décidé d'aller y faire un tour, des fois qu'ils aient quelques CD intéressants.
Le magasin avait l'air bien vide quand je suis entré, tout simplement parce que c'était en fait le tout premier jour d'ouverture de ce nouveau point de vente (d'où les gens qui attendaient l'inauguration...) et tout le stock n'était pas en place.
Aucun CD, donc, mais deux corbeilles de 33 tours  posées par terre.
Au premier regard, ça avait l'air en très bon état, pas trop cher (2 €), mais je voyais surtout de la variété.
Puis j'ai commencé par trouver Emotional rescue des Stones (pas intéressé), mais j'ai été très content de tomber sur un exemplaire en parfait état, complet avec son livret agrafé, de la désormais légendaire compilation Story of The Who, qui joue un rôle déclencheur essentiel dans le roman La double vie de Pete Townshend de l'ami Christophe Sainzelle.
C'était déjà pas mal, mais j'ai continué à regarder les quelques cinquante-soixante disques qu'il devait y avoir, et je suis tombé sur d'autres disques plus ou moins "rock" (Supertramp, l'excellente double compilation des Stones période Decca Rolled gold, que j'ai déjà, Destroyer de Kiss, un double du fou de la gâchette Ted Nugent) que j'ai pris le parti de laisser pour les passionnés ou les requins qui allaient forcément venir après moi, mais j'ai pris sans hésitation deux "pièces", deux 33 tours des années soixante que je n'avais jamais vus, les premiers albums des Royal Guardsmen et des Critters.
Ces deux disques ont été édités en France par Vogue. J'ai de la chance des temps-ci avec disques des années soixante de cette maison, puisque l'an dernier j'en avais trouvé de façon tout aussi inopinée un lot très intéressant avec notamment une compilation de Dion.
Je me souviens que l'an dernier on avait parlé avec Philippe R. des Royal Guardsmen car il avait trouvé en broc leur EP Snoopy vs. the Red Baron. Là, j'ai l'album correspondant. Je partage l'avis de Philippe comme quoi ce n'est pas renversant, mais en temps normal un disque comme ça aurait directement eu sa place ici. Sauf que je lui ai préféré l'album de The Critters, car c'est un groupe dont je n'avais je crois jamais entendu parler et le disque me plaît plus.
Le groupe comptait cinq membres, qui nous sont présentés à l'ancienne au dos de la pochette, dont trois compositeurs-chanteurs (les deux guitaristes et l'organiste) et un batteur presque caricatural, qui "ne s'intéresse qu'à la batterie et à la vitesse en motocyclette" !
L'album a été enregistré en 1964-1965 et est sorti au printemps 1966. Trop tôt pour parler de psychédélisme, donc, mais leur musique est une pop qui oscille entre une légèreté qui tend vers le bubblegum et un son plus électrique/garage.
Le problème est que leur label favorisait le premier aspect du groupe. Du coup, les deux singles/tubes de l'album, Younger girl, reprise d'un titre du premier album de Lovin' Spoonful, et Mr. Dieingly sad, sont certes très des confections légères et très agréables, influencées par les Beatles et les Byrds, mais un peu molles du genou.
C'est le cas de la majorité de l'album, mais les quatre titres rapides qu'on y trouve, Best love you'll ever have (ici titré par erreur Best love you ever had), It just won't be that way, Blow my mind et Everything but time, donnent une toute autre tonalité au groupe. Réunis sur un EP, ils auraient constitué une vraie perle à rendre fous les collectionneurs. Malheureusement, on trouve seulement deux de ces titres sur l'EP français Mr. dieingly sad ou son équivalent espagnol Younger girl.
Par la suite, The Critters ont eu un autre tube, avec le 45 tours hors album Don't let the run fall down on me, avant de connaître plusieurs changements de personnel, notamment parce que certains de ses membres ont été conscrits.
Le groupe s'est séparé après deux autres albums. Le batteur est peut-être bien reparti à motocyclette. L'organiste Chris Darway, auteur et chanteur de deux de mes titres préférés ici, s'est tourné vers la peinture. Le contrebassiste électrique Kenny Gorka a longtemps été co-propriétaire du club The Bitter End à New York. Les guitaristes Jimmy Rian et Don Ciccone ont poursuivi leur parcours comme musiciens, avec Carly Simon, Frankie Valli and the Four Seasons ou Tommy James and the Shondells, notamment.
Je me demande encore ce que faisaient The Critters sur le parking du centre Leclerc à Fagnières et je n'en reviens pas d'avoir encore la chance de faire quelques trouvailles de ce genre en 2017. Espérons que cela va continuer !

L'album est intégralement en écoute sur YouTube.
En 2012, Cherry Red a réédité Younger girl en CD. On le trouve actuellement pour pas cher, et il contient 14 titres en bonus pour en faire l'intégrale des enregistrements des Critters pour Kapp et Musicor.





02 juillet 2017

JACK SCOTT : There comes a time


Offert par Claire B. à Châlons-en-Champagne le 1er juillet 2017
Réf : REL 10.070 -- Édité par London en France en 1961
Support : 45 tours 17 cm
Titres : There comes a time -- Baby Marie -/- The way I walk -- Midgie

Pour les disques, elle a du flair ma sœur Claire !
Depuis quelques temps, elle a pris la bonne habitude d'acheter à mon intention un ou deux 45 tours lorsqu'elle en trouve en brocs. Jamais cher, toujours au pif, mais pas complètement au hasard puisque, la plupart du temps, elle tombe sur des disques susceptibles de m'intéresser, la preuve en est qu'il y en a quelques-uns que j'ai déjà, comme récemment le Space Art que je venais de chroniquer.
La semaine dernière, elle a enchaîné à Châlons les deux mêmes vide-grenier au Mont-Héry et au square Robert Antral qui en 2016 m'avaient rapporté le Johnny "Rock" Feller et le Sister Rosetta Tharpe. Je les avais trouvés au Mont-Héry. Elle, c'est au square qu'elle a acheté trois EP pour 2 € : celui-ci, une bizarrerie associant Louis Armstrong et Bing Crosby, et le Deep in the heart of Texas de Ray Charles en meilleur état que l'exemplaire que j'avais déjà.
Quand Claire m'a annoncé au téléphone qu'elle m'avait acheté un disque de Jack Scott, j'ai eu un coup au cœur. Je lui ai demandé de me donner les titres du disque. Il y a eu un peu de suspense car le titre que j'espérais entendre, The way I walk, n'est que le troisième du disque, mais je n'en reviens toujours pas d'avoir désormais un exemplaire d'époque de l'enregistrement original de cette chanson.
En effet, pour moi, Jack Scott n'est associé qu'à cette chanson, surtout à la version que The Cramps ont enregistrée en face B de leur premier single, reprise sur le maxi Gravest hits.
Mais la carrière de Jack Scott, né au Canada en 1936, ne peut se résumer à ce seul titre. Il a fait ses débuts sur disque en 1956 et a placé dix-neuf titres sur une période de trois ans et demi dans le classement Billboard des meilleures ventes, presque tous écrits par lui. Cet EP reprend ses septième et huitième singles, sortis tous les deux en 1959 aux États-Unis.
Je ne sais pas comment cet exemplaire a atterri à Châlons, mais c'était à l'origine un cadeau. Il y a un message pour l'accompagner, non pas sur la pochette comme le plus souvent, mais sur les deux étiquettes centrales, en anglais sur une face, en espagnol sur l'autre, pour dire à peu près la même chose : c'est en souvenir du premier disque de Jack Scott et pour l'anniversaire de Françoise.
Sans aucun doute, la perle ici c'est quand même The way I walk. C'est surprenant au départ car, même si les paroles sont les mêmes ("Touch me baby and I'll go hog wild"), il n'y a rien de comparable dans le chant de Jack Scott avec la sauvagerie de Lux Interior, et les premières secondes laissent penser qu'on va avoir affaire à quelque chose d'un peu trop propret. Mais c'est une chanson très riche, avec plein d'écho sur le chant, les chœurs doo-wop des Chantones, un solo de saxophone très rhythm and blues par George Katsakis des Royaltones, suivi d'un autre de guitare, très rockabilly.
Chez Michigan Rock and Roll Legends, on apprend que ce titre a été enregistré juste avant que Scott soit appelé à l'armée début 1959. Il n'avait écrit que deux couplets alors, pour faire durer le plaisir, il a fait répéter "Oo-wee, oo-wee, oo-wee, oo-wee, doo-wah" aux Chantones. Au bout du compte, ça fait beaucoup pour l'originalité et l'étrangeté de cette chanson.
Avec les mêmes participants, la face B de ce single, Midgie, est excellente également, dans un moule rockabilly plus classique.
Ma première réaction à l'écoute de There comes a time, c'est que c'était beaucoup plus gentillet, un titre sur un tempo moyen, dans la veine de ce qu'Elvis Presley faisait avec les Jordanaires. C'est vrai, mais c'est d'excellente tenue, parfaitement chanté, et c'est tout sauf de la soupe. Baby Marie poursuit dans ce style.
Avec un disque comme ça qui m'arrive sur un plateau, moi je dis que la vie est belle. A ce rythme, plus besoin d'aller retourner des dizaines de disques de variétoche de bon matin sous la pluie pour ne rien trouver. Je vais me contenter de réceptionner les cadeaux, et il n'est pas obligatoire d'être de ma famille pour m'en faire. Mais avec ce disque et le Yesterday's Children de Philippe R. l'an dernier, la barre est placée haute !

01 juillet 2017

DAVID MARTIAL : Lucie


Acquis sur le vide-grenier de Ludes le 21 avril 2013
Réf : RC 60 -- Édité par Aux Ondes/Disques Célini en France en 1966
Support : 45 tours 17 cm
Titres : Lucie -- Jerk vidé -/- Élise -- Méringué

Depuis des années, sachant que les disques intéressants du domaine du rock au sens large sont de plus en plus difficiles à dénicher sur les vide-greniers, j'ai reporté mon attention et mes espoirs de trouvailles sur des disques bizarres ou improbables et sur des productions d'ailleurs dans le monde entier. Et si on a la chance de trouver certains de ces disques "exotiques" égarés au fin fond de nos provinces françaises, c'est bien souvent parce que des touristes les ont ramenés en souvenir de leurs vacances.
Cela fait bien longtemps maintenant que des disques africains sont très recherchés et réédités. Désormais, tous les lieux de productions musicaux et tous les styles musicaux, même les plus obscurs, font l'objet de rééditions, notamment, pour ce qui concerne ceux auxquels je m'intéresse et que j'ai l'occasion d'acheter, les disques des Antilles et de l'Océan Indien.
Ainsi, ces dernières années, on a vu sortir les compilations Tumbélé !, Haiti direct ou Sol souk séga.
Rien qu'en juin, Strut a sorti la compilation Oté Maloya, qui se concentre sur les débuts du Maloya électrique à La Réunion, tandis que Born Bad passait en revue le boogaloo aux Antilles avec Disque la rayé.
C'est ce dernier disque qui a particulièrement retenu mon attention.
Dans tous mes disques antillais, il y beaucoup de titres étiquetés Compas, Cadence rampa, Biguine, Tumbélé, Meringue, Boléro, Mazurka, mais très peu de Boogaloo.
C'est sûrement pourquoi, s'il y sur Disque la rayé plusieurs artistes dont j'ai des disques (Maurice Alcindor, Henri Debs, Les Vikings), le seul titre effectivement présent dans ma collection, c'est Jerk vidé de David Martial.
J'ai acheté ce disque un jour où je me suis aventuré sur les anciennes terres de Philippe R. à Rilly-la-Montagne et Ludes.
On connaît tous David Martial pour son tube de 1976 Célimène, mais si j'ai acheté ce 45 tours, c'est avant tout parce que, depuis que l'ami Le Vieux Thorax me l'a conseillé, j'achète tout ce que je vois passer du label Aux Ondes/Disques Célini.
Quand ce 45 tours est sorti en 1966, David Martial, qui a fait au fil des années plusieurs aller-retour entre la Guadeloupe et la France métropolitaine, avait déjà une longue carrière derrière lui, puisque ses premiers enregistrements remontent au début des  années 1950 avec l'orchestre Del's Biguine, comme l'explique Jean-Pierre Meunier dans le livret d'une réédition parue chez Frémeaux.
Je n'ai pas chroniqué ce disque au moment où je l'ai acheté car il ne m'avait pas complètement emballé, et surtout parce que je lui avais préféré le 45 tours des Kajulu Boys acheté le même jour.
Il faut dire que cet EP s'ouvre avec le titre qui me plaît le moins, le slow Lucie. Lucie, c'est bien sûr l'une des très nombreuses cousines de l'Aline de Christophe. Je n'ai pas fait le recensement complet des prénoms féminins chantés par David Martial (il y aussi Élise ici), mais bien avant Célimène il s'en était presque fait une spécialité, puisqu'il y en pas moins de quatre (Laetitia, Ernestine, Marie Josée, Marie Clémence) rien que sur son premier album Show folklore.
Vient ensuite le titre sélectionné par Born Bad, Jerk vidé, présenté comme un boogaloo-jerk. C'est un excellent choix puisque c'est de loin le meilleur ici à mon goût, avec un son et un groove quasiment à la 96 tears, avec la basse chaloupée, l'orgue et le cuivre.
La face B n'est pas mauvaise du tout avec enchaînés une excellente biguine, Élise, et Méringué.
Avec toutes ces rééditions, ces disques antillais vont être mieux connus et recherchés par plus d'amateurs, mais j'espère continuer à en trouver régulièrement au fil de mes pérégrinations.