20 novembre 2016

GRAEME ALLWRIGHT : Chante Leonard Cohen


Acquis chez Emmaüs à Reims le 12 septembre 2014
Réf : 6325 600 -- Édité par Mercury en France en 1973
Support : 33 tours 30 cm
9 titres

Presque annoncée par lui-même quelques semaines plus tôt, la mort de Leonard Cohen le 7 novembre à 82 ans, quelques jours après la sortie d'un nouvel album, You want it darker, n'a été une surprise pour personne mais n'en a pas moins déclenché une avalanche méritée d'hommages à grands coups de Suzanne et de Hallelujah, facilités par une profusion de titres de chansons à disposition faciles à replacer ou détourner, de A singer must die à Hey, that's no way to say goodbye, en passant par Death of a ladies man, Passing through ou So long, Leonard.
Parmi les personnalités invitées à témoigner dans les médias, Daniel Schneidermann a relevé une prestation remarquable de Françoise Hardy sur France Inter, où elle a indiqué qu'elle n'appréciait pas trop les chansons de Cohen et a semblé avoir oublié qu'elle avait elle-même enregistré une version de Suzanne en 1968.
Je me suis étonné que, à propos de la France et de Leonard Cohen, on fasse aussi peu référence à Graeme Allwright. S'il y avait quelqu'un à inviter, c'était bien lui. Comme le précise Schneidermann, il a 90 ans et donne encore régulièrement des concerts.
Avec les éditions 10/18, qui ont publié en France dans la première moitié des années 1970 des traductions de ses romans, poèmes et chansons, Graeme Allwright a contribué à faire connaître l’œuvre de Cohen par chez nous en adaptant ses chansons en français, soit quatorze chansons publiées de 1968 à 1985.
Pour ma part, je suis à peu près certain que c'est par Graeme Allwright que j'ai découvert les chansons de Leonard Cohen. Dans nos carnets de chant en colonie de vacances, il y avait Il faut que je m'en aille, ses adaptations de Sacrée bouteille et Petites boîtes, peut-être aussi Petit garçon et je parierais bien qu'il y avait aussi au moins Suzanne.
J'ai cherché un peu, et j'ai trouvé la trace d'un média qui a eu la bonne idée de faire intervenir Graeme Allwright dans un hommage à Cohen. C'est une radio catho, s'il vous plaît, qui, pour son émission Décryptage du 16 novembre, a invité Christophe Lebold, auteur du livre L'homme qui voyait tomber les anges (je ne l'ai pas lu, mais j'ai vu passer de chaudes recommandations) et a téléphoné à Graeme Allwright. J'ai écouté le début de l'émission, jusqu'à la fin de l'entretien avec Allwright, qui débute vers la neuvième minute. Un hommage sobre, sans révélation éclatante, mais on apprend au passage que les deux chanteurs se sont vus régulièrement au fil des années.
Graeme Allwright a adapté deux chansons de Cohen sur son album Le jour de clarté en 1968, deux autres en 1972 sur Jeanne d'Arc. En 1975, après la sortie de New skin for the old ceremony, il en a adapté deux titres sur son album De passage, dont Lover lover lover (également sorti en 45 tours), plus Passing through, de Live songs. Il y a eu des versions de certaines de ces chansons sur deux double 33 tours en public à l'Olympia en 1973 et 1979, plus un So long, Marianne en anglais. Et, en 1985, il a aussi adapté en français, sur un 45 tours, Dance me to the end of love et If it be your will de l'album Various positions (quatre autres adaptations de titres de cet album sont restées inédites).
Il y a le choix donc, et je possède plusieurs de ces disques, mais aujourd'hui j'ai fort logiquement sélectionné cet album Graeme Allwright chante Leonard Cohen de 1973. On y retrouve les quatre chansons précédemment publiées en 1968 et 1972 (je ne sais pas s'il s'agit de nouveaux enregistrements ou pas), plus cinq autres, toutes extraites des trois albums de Cohen alors publiés, Songs of Leonard Cohen (Suzanne, Winter Lady, The stranger song, Sisters of Mercy), Songs from a room (Tonight will be fine) et Songs of love and hate (Avalanche, Last year's man, Diamonds in the mine, Joan of Arc).
Les quelques mots de la main de Graeme Allwright au recto du disque sont une bonne indication du bon esprit qui anime ce disque : "En adaptant ces chansons j'ai essayé de respecter dans la mesure du possible la pensée de Leonard Cohen que j'estime beaucoup. J'espère que mon travail aidera l'auditeur français à mieux comprendre et pénétrer l'univers souvent difficile de Cohen. Je lui dédie ce disque dans l'espoir de nous retrouver un jour sur un chemin plus ensoleillé.".
C'était un projet assez casse-gueule, mais Graeme Allwright s'en tire admirablement. Tout le monde s'accorde pour dire que les adaptations des paroles en français sont réussies. Il chante bien, heureusement sans chercher à imiter Cohen. Les arrangements et la direction d'orchestre de Christian Chevallier sont dans la tradition de la variété française de qualité, et les chœurs féminins couramment employés par Cohen sont bien présents ici sur plusieurs titres.
Avec un matériau de base d'une telle qualité, on pourrait penser qu'il était facile de faire un bon disque, mais je ne pense pas que d'autres auraient aussi bien réussi.
Mes titres préférés sont Diamants dans la mine et Demain sera bien pour les chansons enjouées avec chœurs, ainsi que L'étranger, Suzanne et surtout Avalanche, avec des arrangements très réussis. La version n'est pas mauvaise, mais j'espérais encore mieux de Les soeurs de la Miséricorde. 

A écouter sur France Culture, l'émission A voix nue sur Graeme Allwright en cinq parties.



Graeme Allwright, L'étranger, en direct dans Le cercle de Minuit sur France 2 le 9 décembre 1992, en présence de Leonard Cohen.
Dans le deuxième extrait de la mếme émission, Cohen contredit Graeme Allwright et insiste sur la gaieté de ses chansons.

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